Chapitre 46 - Le diable s'habille en Philivier

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Je présume que le cliché de la chose voudrait que je sois en pleurs, avec mon plaid sur les genoux, mon gros pot de glace d'un litre dans les mains à me faire je ne sais quel film déprimant.

Normalement, c'est ce que je suis supposée faire, mais au lieu de ça, j'ai attrapé mon ordinateur, je me suis mise dans mon lit et j'ai regardé des vidéos de chatons sur Youtube, le tout, sous le regard presque accusateur de Bora qui doit certainement penser que je veux la remplacer.

Ne t'en fais pas, toi et moi, c'est à la vie à la mort ! Nous contre le reste du monde.

Depuis que j'ai chassé Olivier de mon canapé, il n'est pas revenu à la charge et j'ai jeté la licorne péteuse sur un fauteuil, quelque part.

Je me sens conne. Je veux dire, pourquoi je lui en voudrais ? C'est typiquement la scène dans les romans d'amour où la fille se rend compte qu'elle a des sentiments et tout le tralala. Puis vient la petite musique déprimante avec la pluie qui tombe derrière.

Le cliché parfait !

Doux Jésus, Philippine, à quelques détails près tu serais dedans.

C'est n'importe quoi. Depuis quand est-ce que je donne dans ce style-là ? Depuis quand je suis le genre de fille à s'enfiler un pot de glace dans son lit tout en regardant de stupides vidéos ?

Tout ça, c'est de sa faute. Uniquement de sa faute. Ma vie ne serait pas autant en bordel s'il n'y était pas entré.

Je le sais maintenant. J'étais bien « avant ». J'étais moi. J'étais libre. Libre de mes pensées, de mes paroles et de mes gestes. Maintenant, je fais preuve de retenue, de doute, j'essaye de reformuler avant que ça ne sorte.

Je m'autocensure et je ne supporte pas ça.

Alors, c'est tout naturellement que le lendemain, je m'empresse de sortir ma garde-robe des jours « Philippinesque » ainsi que ma playlist. Faisant abstraction totale de la présence de mon « voisin », je mets le volume au maximum.

Un petit coup d'Amy Winehouse de bon matin ?

— Wow ! Wow ! Wow ! C'est quoi ce boucan de bon matin ? Philippine !

— Oh, tu es debout !

Bien sûr ! Qui ne se réveillerait pas avec ça tapant dans les oreilles ?

— Pourquoi t'as mis le son à fond ? Y a des gens qui dorment de bon matin, putain.

— J'avais envie. Pourquoi ? Ça te pose un problème ?

— Un problème ? Oui, je veux dormir. Ça sera trop te demander de baisser le volume ?

— Non, demande pour voir ?

Vas-y, lève les yeux au ciel coco, je t'ai vu.

— Aurais-tu la grande gentillesse de baisser le son, s'il te plaît, Philippine ?

— Hmmm, commencé-je en faisant mine de réfléchir. Non.

Je crois qu'entre toi et moi, il est temps de recadrer les choses. Pendant trop longtemps j'ai joué selon tes règles et je me suis abaissée à tes caprices, maintenant, c'est à ton tour.

— Non ? Et je peux savoir pourquoi ? Je viens pourtant de te le demander gentiment.

— Et alors ? Rien ne m'oblige à me plier à ta demande. Pas envie.

— Écoute, t'as un truc contre moi ? Je t'ai fait quelque chose ?

— Rien. Tu n'es pas le centre de mon univers, Olivier, faut te calmer. Nombriliste, va.

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant