Chapitre 51 - Partenaires dans le crime

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Aujourd'hui est un grand jour.

— Alors ? T'en dis quoi ?

— Hm, la femme m'a l'air un peu spéciale, genre c'est elle qui porte la culotte dans le couple, regarde comment elle lui parle !

— En même temps, il se laisse complètement marcher sur les pieds aussi. Il n'a qu'à lui tenir tête, ce n'est pourtant pas si compliqué.

— Avec un dragon pareil ? Même moi je n'oserais pas.

— Dit-il alors qu'il a fait son spectacle dès le premier jour.

— Je voulais t'impressionner, en fait.

— Mais bien sûr.

— Qu'est-ce qu'on fait ? On va les accueillir avec un petit panier de muffins à la « Desperate Housewives » ?

— Tu n'as qu'à y aller, toi, si tu veux, moi je sors la poubelle.

— Allez, Philippine ! Ça peut être marrant !

— Bon, c'est bien parce que c'est toi. Viens.

— Ouais !

Tel un enfant enthousiaste à l'idée d'aller au MacDo du coin ou au parc d'attractions, voilà qu'Olivier m'emboîte le pas en sautillant, tout content.

— J'ai hâte.

— Chut. Sois sérieux. Mets-toi dans le rôle.

— Ah oui. Pardon.

Aujourd'hui est un grand jour.

De nouveaux voisins emménagent.

Alors que les portes d'ascenseur s'ouvrent sur eux, les bras chargés de cartons et boîtes, Olivier et moi avons décidé de les accueillir comme il se devait, en bonne et due forme.

— Putain, mais tu me fais chier ! Si je te dis que c'est pas moi qui ai mangé toute la mousse au chocolat !

— Ah ouais ? Tu me prends pour une idiote, c'est ça ?C'est comme lorsque j'ai trouvé ce string dans la poche de ta veste, hein ? Tu me trompes, avoue-le !

— Quoi ? Mais n'importe quoi ! T'es complètement folle, ma parole !

— Euh... on dérange ? On peut prendre l'autre ascenseur ?

— Bah alors prenez-le au lieu de nous faire chier, là ! C'est pas une scène, ok ? Je vous jure...

— Sérieusement ? Vous aviez besoin de demander ? Prenez des initiatives dans cet immeuble, merde à la fin !

Olivier part devant, faisant semblant d'être furieux tandis que je le suis de loin. On se retient jusqu'au local à poubelles avant d'exploser de rire devant leurs têtes sidérées.

— T'as vu sa tête, à la fille ? J'en pouvais plus.

— Et le gars était complètement gêné. Bien joué, Monsieur Joyeau !

— Mais tout l'honneur vous revient, Mademoiselle Tagliani. On recommence ? Ils doivent certainement attendre devant l'ascenseur du coup.

— Espèce de gamin, tu sais que ce sont peut-être dans un de tes appartements qu'ils s'installent ?

— Ça m'étonnerait, Robert m'aurait prévenu s'il y avait eu une visite et puis je me serais occupé de voir si l'appartement est en état, déjà.

— Oh, je vois que Monsieur est un propriétaire concerné.

— Mon porte-monnaie, lui, est très concerné, effectivement. Je ne vais pas dire non à une rentrée d'argent supplémentaire.

— J'aurais dû m'en douter. Bon, on y retourne.

— Attends, attends, je me remets dans le rôle, fais-je en trépignant d'impatience de reprendre ce nouveau jeu de rôle qui, ma foi, me ravie.

Il souffle plusieurs fois avant de repartir tandis que je m'empresse de le suivre en hurlant comme une furie.

— De toute façon, vous êtes tous les mêmes, vous les mecs avec vos sales manies de coureurs de jupons ! crié-je en exagérant absolument tous mes gestes.

— Comme d'habitude il faut que tu généralises, hein ? T'es vraiment une harpie !

— Bouffon. Dites, vous ne voulez pas échanger de copain ? Le vôtre, il a l'air plus cool, sifflé-je en me retournant vers la nouvelle voisine.

— Euh, non, ça ira... Je pense... commence-t-elle à avancer sans comprendre ce qui se passe actuellement devant elle.

— Non, m'empressé-je de la couper.

— Quoi ?

—Vous ne pensez pas. Vous ne devez pas penser. Je veux dire... vous êtes blonde. Une blonde ne pense pas.

— Vous savez qu'une couleur de cheveux ne définit pas un individu ? me dit-elle interloquée par ma remarque tandis que je contiens tant bien que mal un sourire en mordillant mes lèvres.

— Sans doute, mais les brunes, nous, quand on attend un ascenseur, on a l'intelligence d'appuyer sur le bouton pour l'appeler.

J'aperçois le sourire d'Olivier tenter une sortie, mais être retenu par ce dernier.

— Au fait, moi c'est Philippine et vous ?

—Vanille...

— Ah. Vous n'en avez pas l'odeur, pourtant. C'est dommage.

Bon, Philippine, ça suffit, on se calme maintenant.

On grimpe dans l'ascenseur tandis qu'Olivier pousse allègrement nos deux futurs voisins sur le côté en leur indiquant le poids max de la cabine.

— Vous êtes trop lourds. Désolé.

Et nous revoilà repartis, morts de rire tous les deux.

— Je commence à croire que je déteins sur toi pour que tu puisses ainsi pousser les gens.

— Va savoir. Par contre, ce que tu lui as dit... c'est presque méchant.

— Non, ce n'est pas méchant. Elle s'appelle « Vanille », quoi. Elle ne pouvait pas s'appeler Alexandra, Marguerite ou Margaux, non ! Vanille !

— Que veux-tu ? Peut-être que sa mère avait des envies de salade de fruits, hein...

— Si ça devait marcher comme ça... toi... ah bah ça marche. Olive... Olivier, mais moi...

— Une envie de voyage ?

Fiers de notre petite prestation, on s'affaisse tous les deux sur son canapé, le sourire aux lèvres.

— Check la ! Bien joué, partenaire ! Pas mal pour une fille au caractère isolationniste comme l'île portant le même nom.

— Ne recommence pas, hein. Partenaires dans le crime, Monsieur Caillou ? proposé-je en lui tendant ma main.

— Partenaires, me répond-il en se saisissant de cette dernière, tout sourire.

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant