Où l'on fait connaissance... - 4

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Zabini renifle, et puis il se penche en avant et jette un regard à travers ce qu'il reste de la porte. 

— Où est Greg ? Ne me dites pas qu'il est toujours aux chiottes ? Si chier était une discipline olympique, il rendrait l'Angleterre fière. 

— Dégoûtant, murmure Pansy en frissonnant. 

— Allons, allons, Pans. Vanter le système digestif de notre ami ne mérite pas que tu tordes le nez, dit Zabini. 

Il marque une pause, l'air d'attendre. 

Le visage de Ron prend une expression torturée : un mélange de plaisir devant une blague scato et d'agacement car la blague en question est de Blaise Zabini ce qui veut dire qu'on ne peut en rire en aucune circonstance. 

Harry, pour sa part, ne parvint à trouver d'amusement ni dans la blague – qui ne mérite pas mieux qu'un vague reniflement, à son avis – ni dans le dilemme évident de Ron. Il est terriblement perturbé, et le pire, c'est qu'il n'arrive pas vraiment à dire pourquoi. 

Ce n'est pas tant que Blaise Zabini est assis si près de lui qu'il peut sentir la chaleur de son haleine sur sa joue. 

Ce n'est pas que Millicent Bulstrode a repris le nom de Voldemort pour son nouveau chat et qu'il est quasiment obligé de se mordre la main pour éviter de lui raconter la fois où Hermione s'est accidentellement métamorphosée en félin en prenant du Polynectar à cause d'elle. Ça semble si loin, maintenant. 

Ce n'est pas qu'il en a appris bien plus qu'il ne le souhaitait – bien plus que n'importe qui pourrait le souhaiter, c'est certain – sur les habitudes intestinales de Gregory Goyle, et que bientôt ledit Goyle se pointera, soit pour lui marcher sur les pieds, soit pour s'asseoir sur ses genoux, vu là où ils sont rendus. 

Ce n'est même pas qu'il trouve de plus en plus étrange que personne ne soit venu s'enquérir du bruit de verre brisé. 

Ce n'est pas que Pansy ait mentionné avec désinvolture le nom de ce satané Drago Malefoy.

Harry sait que Malefoy revient à Poudlard lui aussi cette année – McGonagall a pris rendez-vous avec lui dans son bureau temporaire au Ministère pour lui en parler en privé, avec un drôle d'air, comme si elle pensait qu'il était incapable de gérer ça ou Dieu sait quoi – mais bon, il y a le savoir et... le savoir. Ses mains sont moites, tout d'un coup, et Harry les essuie sur son pantalon en essayant de ne pas repenser à la dernière fois où il a vu Malefoy, et à la rage impuissante sur son visage. 

Il sait qu'il ne s'en sort pas très bien quand Hermione finit par dire d'une voix décidée :

— Bon, ce n'est pas que je n'apprécie pas cette petite conversation... 

Elle fait une pause pleine de sous-entendus. 

Elle a toujours été capable de lire en lui comme à livre ouvert – et vu comment Hermione lit ses bouquins, il n'est toujours pas sûr de savoir si c'est une bonne chose ou non. 

— J'en suis vraiment heureux, dit Zabini avec une mine parfaitement sincère. 

Et il refait son sourire « tu es la seule fille sur cette terre, Hermione Granger ». 

Malgré lui, Harry est presque impressionné. Ça doit vraiment demander beaucoup d'efforts pour parvenir à ce degré d'enfoirade visqueuse. 

— Écoute, espèce de branleur, commence Ron avant de s'arrêter, hésitant. 

Les Serpentard semblent tous avoir développé une audition extrêmement sélective et regardent par la porte. 

Harry se rend compte qu'il est en train d'enfoncer ses ongles dans ses paumes et se force à arrêter. Ça laisse des petites demi-lunes blanches sur sa peau. 

— C'est quoi cette puanteur ? demanda Zabini d'une voix joyeuse en s'éventant et en fronçant le nez. 

— C'est toi, trouduc, répond Gregory Goyle avec un merveilleux sens de la répartie. 

Il se tient sur le pas de la porte, les bras ballants, visiblement perturbé par le manque de siège. 

— C'est qui qui a niqué la porte ? 

— Bull', répond Pansy avec un peu trop d'empressement. 

— Balance, renifle Millicent. 

Harry commence à se demander si Zabini a réglé un chronomètre de façon à ce que tous les Serpentard de l'école se pointent dans leur compartiment au compte-goutte. 

— Heu... dit Goyle en continuant à se tenir là, les bras ballants. 

Hermione craque.

— Pour l'amour de Merlin. Capacious Extremis, prononce-t-elle en pointant une baguette efficace sur chacune des deux banquettes tour à tour. 

Les sièges s'allongent avec un craquement menaçant pour s'étendre dans un espace qui n'existe pas, mais cela n'a pas l'air de poser problème. 

Goyle grommelle quelque chose qui pourrait être un merci – bien qu'il n'y ait aucune certitude à ce sujet – et entre dans le compartiment d'un pas pesant. Il manque de peu se fondre dans la porte puisque Hermione jette au même instant un Reparo avec un peu plus de vigueur que nécessaire.   

— Il en reste encore beaucoup dans votre clique ? demande Harry en se laissant submerger par l'exaspération. 

Hermione a fini par baisser les bras, et maintenant Malefoy va arriver d'une minute à l'autre et lui gâcher l'existence. Comment a-t-il pu croire que ça irait ? Bon sang, comment a-t-il pu se laisser persuader par Kingsley qu'après un an à exercer en tant qu'Auror officieux, revenir à Poudlard pour passer ses ASPICs était une bonne idée ? 

Le court silence qui suit sa question semble très, très long. Presque aussi long qu'un voyage en train jusqu'en Écosse. Et pour la première fois, Harry se demande pourquoi ça prend si longtemps, alors que le train est magique. S'ils pouvaient arriver maintenant, ça ne le dérangerait pas. Il pourrait fuir dans la tour de Gryffondor. Avec un peu de chance, s'il prend tous ses repas dans la salle commune, peut-être qu'il arrivera à ne plus jamais se retrouver en présence d'un Serpentard jusqu'à la fin de l'année.   

Tatoué sur mon cœur  - DrarryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant