Nuage noir et pensées pluvieuses - 1

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Nuage noir et pensées pluvieuses

Quand Malefoy descend prendre le petit déjeuner en ce lundi matin, il y a un nuage noir qui flotte au-dessus de sa tête. 

Littéralement. 

Depuis sa place à la table des Serdaigle avec Luna parce qu'elle l'a invité et Zabini parce qu'il est une infection pour laquelle il n'existe pas de remède, Harry le fixe. Comme à peu près tout le reste de la salle. 

Malefoy fonce droit sur eux, l'orage sur le visage. Un petit éclair jaillit du nuage et vient lui piquer la joue. 

— Je n'y suis pour rien, dit Zabini, jovial. Peut-être que si tu arrêtais de faire la gueule, il partirait ? 

Harry commence à connaître Zabini un peu mieux maintenant. Plus il est jovial, moins il faut lui faire confiance. Alors quand Malefoy ressort de la Grande Salle (Harry imagine brièvement l'arrêter avant qu'il parte pour lui demander qu'il arrête d'être un branleur suffisamment longtemps pour qu'ils règlent cette histoire d'âmes sœurs mais même lui est capable de voir que Malefoy ne sera peut-être pas des plus réceptifs en ce moment), il se tourne vers Zabini et le fixe d'un air accusateur. 

Zabini trempe un morceau de son pain au chocolat dans son café au lait et fait de son mieux pour prendre une mine innocente.

— Quoi ? 

— Je crois que Drago se sent peut-être un peu triste aujourd'hui, dit Luna.

Sans blague, pense Harry.

— Les manifestations météorologiques spontanées sont fascinantes, vous ne trouvez pas ? poursuivit-elle. Nous avons fait des recherches dessus pour un article dans le Chicaneur une fois. Il y a un malheureux qui s'est fait pleuvoir dessus pendant plus de vingt ans ! J'espère que ça s'éclaircira bientôt pour Drago. 

— Tu vis sur une autre planète ? demande Zabini en s'arrêtant avec sa viennoiserie à mi-chemin de sa bouche. 

— Oh non, je ne pense pas, répond Luna avec sérieux. 

— Heu, je crois que Zabini est possiblement responsable de, hum, la couverture nuageuse de Malefoy, explique Harry. 

Luna tourne ses grands yeux graves vers lui. 

— Oui, mais les sorts de ce genre ne font que porter à la lumière ce qui est déjà dans notre cœur, pas vrai ? 

***


— Elle est un peu spéciale, hein, ton amie Luna, dit Zabini pensivement alors que lui et Harry se rendent vers les serres ensemble après le petit-déjeuner. Est-ce que ça va bien dans sa tête ? 

— Ne parle pas d'elle comme ça ! rétorque Harry. 

Il dévale les escaliers dans une tentative de semer Zabini. 

— D'accord, d'accord, ne t'excite pas, dit Zabini, un peu hors d'haleine quand il finit par le rattraper à l'extérieur. Je disais, juste. C'est pas moi qu'on a surnommé Luna-tique, hein. 

Harry le fusille du regard et se prépare à tenter une nouvelle échappée. 

— Attends, attends, s'écrie Zabini. J'allais ajouter : mais elle a raison. Je ne sais pas ce qui cloche chez Drago. Enfin, en-dehors de ce qui est évident. Le petit chou est revenu de chez sa maman de pire humeur que quand il est parti d'ici, ce qui n'est pas peu dire. 

Harry essaie de ne pas grincer des dents. Il pense que « ce qui est évident » est déjà bien suffisant comme ça. Et puis... passer un weekend avec Narcissa Malefoy doit être suffisant pour mettre n'importe qui de mauvaise humeur, même son propre fils, non ? Il parcourt la pelouse en grandes enjambées et s'arrête devant les serres. Il ne sait pas dans laquelle ils ont rendez-vous aujourd'hui. Il espère que cette semaine il aura plus de succès dans ses tentatives pour faire dévorer Zabini par des plantes anthropophages. 

— C'était bien aimable de ta part de l'aider à se sentir mieux, alors, dit-il en se retournant. 

Il se demande s'il osera à nouveau proposer à Malefoy de se mettre en binôme avec lui quand il arrivera, ou si ça aurait comme résultat que ce soit lui qui se fasse dévorer par ladite plante anthropophage. 

— Oh, je pense que Drago y survivra, déclare Zabini sans compassion, juste au moment où Ron et Hermione arrivent. 

Il sourit soudain largement. 

— Au pire, je pense qu'un peu de neige devrait l'égayer un peu, tu ne crois pas ? 

Tout d'un coup, Harry en a plus que marre des Serpentard narquois et sarcastiques et de leurs remarques narquoises et sarcastiques. 

— Non, je ne crois pas, répond-il hargneusement. 

— Mais quelle mouche t'a piqué, dit Zabini au même instant où Ron lui donne un coup de coude et chuchote :

— Ne réagis pas, Harry. Quoi que ce soit, il essaie juste de te provoquer. 

— Je pense juste que tu n'es pas un très bon ami, dit Harry à Zabini. 

L'autre l'a poussé à bout, mais dès qu'il le dit, il se sent con. Probablement, il faut bien l'admettre, parce qu'il a pris une voix de parfait connard. Mais c'est vrai – il ne pense pas que Zabini, ou aucun des autres Serpentard, n'est un très bon ami. Les amis sont censés vous réconforter quand ça ne va pas. Pas vous humilier et vous donner l'impression que tout est encore mille fois pire. 

Zabini le dévisage, bouche bée, avant de hausser les épaules et d'aller s'appuyer contre les panneaux de verre de la serre la plus proche. Il croise les bras, une expression boudeuse sur le visage. 

Harry ressent une mini-pointe de culpabilité – le fait qu'il ait réussi à faire taire Zabini laisse entendre qu'il vient peut-être de marquer un point, mais c'est alors qu'il réalise qu'il ne veut pas vraiment marquer de points contre Zabini. Il veut juste... 

Dieu sait ce qu'il veut. En premier lieu, remonter le temps et revenir à une époque où il n'a jamais eu besoin de réfléchir au fait que Malefoy pourrait... quoi ? 

Il ne veut pas y réfléchir maintenant. Même s'excuser auprès de Zabini est mieux que d'y réfléchir. Alors :

— Désolé, dit-il d'une voix morne en essayant d'ignorer le coude que Ron fourre dans ses côtes, probablement pour lui faire comprendre subtilement qu'il est dingue de s'en faire pour Zabini. Ce n'était pas sympa. Mais ce n'était pas sympa non plus de faire ça à Malefoy, ajoute-t-il, incapable de s'arrêter. 

Il joue à quoi ? Au chevalier servant de Malefoy ? C'est certain que Malefoy en serait ravi

— Une leçon de vie de la part de Saint-Potter, hein ? dit Zabini avec méchanceté, en regardant au loin. Quelle chance. 

Mais avant que Harry puisse lui dire d'aller se faire foutre, il se tourne en levant les yeux au ciel. 

— Je ne suis pas complètement sans cœur, dit-il en se décollant du mur. Je comptais annuler le sort avant qu'il sorte du dortoir, après avoir vu sa réaction, mais cet abruti ne s'en est même pas rendu compte et il a dû se faufiler dehors pendant que je m'habillais. Sérieusement, comment tu fais pour ne pas remarquer un putain de nuage qui te pleut dessus ? 

Simplement en ayant une tornade dans le cœur, pense Harry lugubrement, dans une logique digne de Luna. 

Tatoué sur mon cœur  - DrarryWhere stories live. Discover now