Chapitre 23

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Point de vue Charles Leclerc

Avril, Italie 2022,

-Je peux savoir, c'est quoi ton problème ? Je demandais à Lorenzo sans perdre une seconde.

-Mon problème ? Charles, t'as vu comment elle m'a regardé.

-Peut-être que si t'avais pas commencé par l'appeler la « fameuse Noa », elle t'aurait pas regardé comme ça.

-Vous êtes tous obsédés par elle, toi, Arthur, Maman. Ok, je te l'accorde, elle est jolie et apparemment elle sait chanter. Mais, la meuf n'est même pas sympa.

Non, Noa n'était pas sympa, clairement pas, et elle ne tentait pas de l'être. Mais elle était tellement plus que cela. Elle était drôle, honnête, intelligente. Et la confiance en elle qu'elle dégageait était un des trucs les plus sexy, qu'il m'ait été de voir. Il y avait une telle dissonance entre la manière dont je voyais Noa, et la façon dont Lorenzo parlait d'elle, que je ne puis retenir l'agacement en moi qui se traduisit dans mon ton :

-Déjà c'est pas une meuf, j'insistais sur le mot. C'est la femme, que je vais demander en mariage. Et je ne te demande pas de l'apprécier, simplement, de ne pas te foutre de ta gueule.

Il se renfonça dans sa chaise, la faisant reculer dans le même mouvement, puis il passa ses mains dans ses cheveux et poussa un long.

-C'est toi qui te fous de ma gueule plutôt, sa voix était redescendue au point que c'était plutôt comme si je lisais sur ses lèvres plus que je ne l'entendais.

-Je l'aime Lo.

-Tu la connais à peine, il dit plus fortement, il reprit tout de suite me coupant la parole alors que je suis sur le point de lui répondre. On n'aura pas cette conversation maintenant. Tu dois te concentrer sur ton week-end.

Frustrer, je le regardais à son tour quitter l'hospitalité.

Je détestais la situation dans laquelle je me trouvais, entre Noa et Lorenzo. Je détestais qu'il y ait eu cette animosité entre eux, aussi rapidement et pour rien. Je n'arrivais pas à comprendre comment j'avais pu me retrouver dans cette situation, alors que quelques heures plutôt je pensais passer un excellent week-end. Ce que je ne savais pas à cet instant, c'est que le week-end ne ferait que s'empirer.

Mes qualifications se passèrent bien même si les choses ne s'arrangèrent pas. La présence de Nathan permit à Noa d'avoir une excuse pour ne pas mettre les pieds dans l'hospitalité Ferrari. Il était plutôt clair qu'elle cherchait à fuir Lorenzo. Ce que je trouvais en dehors de son caractère. Noa à mes yeux n'était pas du genre à fuir le conflit. Mais comme m'avait ordonné Lo, je me concentrais sur mon week-end.

En retrouvant Noa à l'hôtel, la tension qui s'échappait de son corps parvint presque à m'étouffer.

Nous aurions tout le temps de discuter de ce qu'il s'était passé avec mon frère à notre retour à Monaco ou même avant de rentrer à Monaco. Quand nous serions à Rome pour le concert de sa copine.

Dimanche, la tension était à son comble, pas juste entre Noa et moi, mais aussi dans le garage, la pression montée à mesure que l'heure avançait. Il était important que nous sortions un bon résultant pour ne pas laisser Redbull nous devancer de trop. Pourtant, je pouvais le sentir dans mes entrailles, quelque chose n'allait pas.

Depuis petit j'avais mon rituel, avant de monter dans la voiture. Je m'isolais dans ma driver's room, le plus longtemps possible avant de rejoindre le garage et je prenais le temps de méditer. M'ancrer dans mon corps, dans le moment présent, affuter mes sens, réveiller mes muscles. Installé dans la voiture, la tension disparut, et un calme presque parfait m'envahit. Il ne restait que la concentration, je savais ce que j'avais à faire.

La course fut pitoyable.

Le genre qu'il fallait mieux oublier. Après avoir réalisé ma pesée, je m'enfermais de nouveau dans ma driver's room, incapable de me rendre aux interviews pour le moment. Sixième. J'avais fini sixième à cause d'une erreur de merde. Les entrailles dans mon estomac se tordirent de dégoût, un dégoût dirigeait contre moi-même. C'était pas humain d'être aussi débile, non, mais franchement, on m'avait pas terminé à la naissance, la seule explication possible ça et puis ...

La pensée traversa nécessairement mon esprit. Est-ce que ce qu'il s'était passé entre Noa et Lo avait affecté ma performance ? Et si je me posais la question, je savais que d'autres le feraient également. Lo allait le faire. L'occasion serait trop belle pour ne pas qu'il me le renvoie à la gueule pour confirmer que je pétais les plombs. Dans un geste d'humeur, je donnais un coup dans le fauteuil le plus près de moi. Malheureusement, j'anticipais mal la distance entre celui-ci et mon tibia me faisant mal dans le même temps. Je me retrouvais donc comme un idiot à clopiner jusqu'au canapé.

-Encore cinq minutes, je répondis au coup qui venait de s'abattre sur la porte

-C'est moi, dit Noa en poussant doucement la porte.

Je soupirais longuement avant de détourner mon regard pour ne pas tomber sur son visage. Je ne voulais pas y lire la pitié que je pensais y trouver. Je ne voulais pas y deviner qu'en réalité j'avais merdé comme un grand et que je ne pouvais m'en prendre qu'à moi-même. Et pire que tout cela, la déception.

Même si, Noa ne se considérait pas comme fan de formule 1 ou même simplement intéressée par la formule 1. Mon résultat ne manquerait pas de la décevoir tout de même. Elle et toutes les personnes qui me supportaient.

Elle entra plus en avant dans la pièce et s'asseyait à côté de moi puis glissa sa main dans la mienne sans rien dire. Nous restâmes comme cela une bonne dizaine de minutes. Sa présence suffit à me calmer. La colère reflua sans disparaitre, et je pris plusieurs minutes pour apprécier qu'elle soit là. Il n'y avait rien, qu'elle puisse faire pour me rassurer ou me remonter le moral en dehors d'être là, physiquement avec moi et c'est ce qu'elle fit. Je l'en remerciais silencieusement.

-Tu devrais aller prendre ta douche. Ils t'attendent pour tes interviews.

Je soupirais à nouveau avant de lui répondre :

-T'es ma PR maintenant

-Non, mais je l'ai croisé avant de venir. Comment ça se fait que personne ne parle anglais dans cette écurie ? Heureusement que je comprends plus ou moins l'italien sinon, je n'aurais jamais réussi à te retrouver, elle dit sans prendre ombrage du ton que je venais d'employer. Douche, elle insista en faisant un mouvement de tête en direction dans la minuscule salle de bain présent dans la pièce.

Cette fois que je soupirais, ce fut en me redressant pour me rendre à la douche.

-Je dois accompagner Nathan à l'aéroport, on se retrouve à l'hôtel, après que tu aies rempli tes obligations de pilote.

Je secouais un peu bêtement la tête en enfilant mon polo Ferrari.

-Charles, elle dit avant de sortir de la pièce. C'est juste une course.

Elle n'ajouta rien de plus et je ressassais ses mots alors qu'elle fermait la porte derrière elle.

Je me rendis côté presse avec ses mots dans la tête. C'était juste une course. J'appréciais qu'elle tente de dédramatiser la situation, j'appréciais qu'elle se contente d'être un soutien sans m'imposer ses opinions habituellement tranchées. Et en même temps qu'est-ce qu'elle y connaissait en formule 1.

La dispute entre Noa et Lorenzo ne changeait rien de mon côté, ce n'était même pas à proprement parler une dispute, mais plutôt une mésentente. N'avait eu aucun effet sur ma course, je ne pouvais pas me cacher derrière cette excuse, je devais, assumer avoir commis une

erreur, apprendre de celle-ci pour ne plus jamais la refaire. Je ne devais pas laisser ma confiance en moi en pâtir. Je devais croire en moi. Sinon, je ne pourrais jamais prétendre à un titre de champion du monde. Et c'est ce que je voulais, plus que tout au monde, plus que Noa. Devenir champion du monde. 

La Prima DonnaWhere stories live. Discover now