Chapitre 8 - Partie 2

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Des images allaient et venaient dans l'esprit d'Océane sans qu'elle puisse vraiment se fixer sur une. Sa conscience lui suggérait qu'il s'agissait de souvenirs passés et à venir. Elle les sentait tourbillonner autour d'elle et commençait à perdre pied. La jeune femme se sentait opprimée, tentant de se débattre sans toutefois avoir la force de faire le moindre geste, comme si son corps entier était aussi lourd qu'une enclume. Soudain, comme un éclat au loin, elle entendit une voix familière l'appeler, s'accrochant désespérément à cet appel, elle lutta pour remonter à la surface. Elle se redressa dans un sursaut, haletante. Elle était à présent sur la couche où elle s'était endormie un peu plus tôt. William avait une main sur son épaule et la regardait aussi bien intrigué que perplexe.

— Océane, ça va ?

— Je crois que oui, à présent, déclara-t-elle avec une voix saccadée.

— Tu remuais dans ton sommeil, j'ai essayé de te réveiller mais je n'y arrivais pas.

— C'est comme si j'étais bloquée dans mes souvenirs, sans arriver à en sortir. C'était très étrange !

A présent, elle avait repris son souffle et regardait autour d'elle. De faibles rayons du soleil entraient par la minuscule fenêtre, le feu était en train de mourir et les selles n'étaient plus dans la cabane. William, suivant son regard lui dit :

— Nous sommes presque à la mi-journée et le brouillard tombe, il est temps de partir.

Océane se leva, rangea sa couverture, puis fit le nouveau bandage de son maitre. Ensuite, quand tous deux furent prêts, ils sortirent de la cabane pour affronter la froide journée et le voyage qui les attendait.

Ils chevauchèrent toute la journée, faisant de très rares pauses, plus pour permettre à Océane de se détendre les jambes que pour reposer les chevaux, William voulait arriver aux montagnes avant la tombée de la nuit. Ils maintinrent une vitesse rapide jusqu'à leur arrivée aux pieds des chaines rocheuses. C'était de véritables cordillères qui séparaient les Plaines du Soleil de la Forêt des Songes. Seuls quelques passages, bien cachés, permettaient de parcourir la montagne. Peu de personnes les connaissaient et William était l'un d'entre eux. Ils s'aventurèrent dans un petit chemin étroit et escarpé, caché de prime abord par des arbustes. La nuit tombait rapidement et il devint presque impossible de voir deux mètres devant soi. William décida donc de monter le camp. Ils s'abritèrent dans une simple niche de la paroi rocheuse, échappant ainsi au vent hurlant. Océane sombra dans le sommeil à peine allongée, et sa nuit fut peuplée des mêmes images que précédemment dans la journée. Ce fut encore William qui la tira du sommeil au petit matin, et sans un mot, ils levèrent le camp et continuèrent leur route. Les trois journées qui suivirent furent pareilles. Océane épuisée, s'endormait à peine le pied posé au sol, toujours ses cauchemars l'envahissaient et chaque matin son maitre la réveillait.

A la fin du quatrième jour, au détour du sentier, Océane aperçut enfin avec soulagement ce qu'était la Forêt des Songes, une étendue verte à perte de vue. Jamais elle n'avait vu autant d'arbres de sa vie, et si la montagne lui inspirait un sentiment de malaise, la forêt la rassérénait.

— C'est magnifique, s'exclama-t-elle.

— Tu trouves ? lui demanda William en s'approchant d'elle.

— Vous n'êtes pas d'accord avec moi ?

— C'est-à-dire que mon ressenti quant à cet endroit est plus complexe.

— Mais c'est chez vous pourtant !

— Pas exactement, répondit le jeune homme. Cette terre m'a recueilli mais ce n'est pas chez moi.

— Comment ça ? le questionna Océane intriguée.

— Peu importe. Je te présente la Forêt des Songes, Royaume de cette chère Lysianna. Fais attention à tout ce que tu fais ou dis en sa présence. Ceci est un conseil avisé.

Océane le regarda intriguée. Elle n'y avait pas fait attention durant les derniers jours, mais le visage de son maitre s'était assombri et ses traits figés. Elle avait l'impression de retrouver l'homme qu'elle avait vu pour la première fois au château de Mordrais et non celui qu'elle avait découvert ces dernières semaines. La jeune servante se tourna à nouveau vers la forêt se demandant ce qui les attendait à l'intérieur.

***

De l'autre côté des montagnes, sur les Plaines du Soleil, le Seigneur Mordrais enrageait dans son château.

— Comment est-il possible que cet abruti de William soit revenu au château, qu'il ait tué l'un de mes hommes et qu'il se soit échappé sans que personne ne s'en rende compte ? tonna-t-il. Comment ? Je voudrais comprendre.

Face à lui, une dizaine d'hommes, dont certains de ses conseillers, gardèrent tête baissée sans oser dire quoique ce soit.

— Et puisqu'il était là, ajouta-t-il sans décolérer, personne n'est parti sur ses traces pour le retrouver. Mais qui est-ce qui m'a entouré de débiles profonds comme vous ?

D'un revers de la main, il balaya tous les papiers qui se trouvaient sur son bureau, jusqu'à ce que son regard s'attarde sur un en particulier que Finwë lui avait envoyé. Un sourire naquit lentement sur son visage.

— Toi, fit-il en désignant un des hommes. Tu vas prendre en note ce que je te dis. Quant à vous, hurla-t-il aux autres. Vous allez me retrouvez les personnes qui l'ont caché. Il était dans les environs, c'est certain. Et vraisemblablement mal en point avec les hommes qu'il a dû affronter. Alors vous allez me retrouver qui a bien pu l'aider ! Et ne me décevez pas !

Finalement, songea Mordrais une fois que ses hommes se furent carapatés, cela ne changeait pas grand-chose que le gamin se soit échappé. Peut-être même que cela allait leur être utile.

La légende des deux royaumes [TERMINÉ]Where stories live. Discover now