Chapitre 8 - Partie 1

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Le lendemain de la discussion nocturne entre Gabriel et Inwë, cette dernière débarqua passablement énervée dans la salle d'entraînement. Elle n'avait presque pas dormi de la nuit les nerfs trop à vifs après leur conversation impromptue.

Gabriel la comprenait. Gabriel acceptait ses reproches. Gabriel se comportait parfaitement. Mais elle n'avait pas envie de compréhension, d'acceptation ou de perfection. Souhaitait-il lui démontrer qu'il se trouvait supérieur à elle, en agissant ainsi ? Ou bien, acceptait-il simplement ses erreurs et, ne pouvant les modifier, les assumait, continuant sa vie sans s'encombrer du passé ?

Inwë aurait préféré qu'il soit en colère, furieux et hors de lui, qu'il se moque d'elle, qu'il se repentît. Mais elle pressentait que ce n'était pas le cas. Gabriel ne désirait pas s'attarder sur tout cela, il ne voulait pas sombrer dans la rancœur et le désespoir. Il n'aspirait pas non plus à une vengeance douloureuse. Tout ce qu'il souhaitait, et la jeune femme s'en rendait bien compte, c'était de continuer sa vie sans se laisser dicter sa conduite un instant de plus par l'homme qui lui avait déjà ravi tant d'années.

Elle le détestait de pouvoir tourner la page si vite et elle le haïssait de ne pas faire plus cas que cela de la mort de William. Du moins, c'était ainsi qu'elle s'expliquait sa colère face à cet homme si calme. Elle n'arrivait pas à gérer sa sérénité et encore moins compréhension.

« Qu'il aille s'étouffer avec. » songeait-elle au moment où elle fit ses premiers pas dans la salle d'entraînement.  Bien évidemment, Gabriel s'y trouvait déjà, en compagnie d'Elio et d'Erid qui les regardait s'exercer en faisant quelques remarques. Ce matin encore, il semblait calme et apaisé. Elle était irritée, à fleur de peau. Toutes ses émotions qui bouillonnaient en elle sans qu'elle puisse les maîtriser ou les comprendre.

S'approchant de son ami d'un pas décidé, elle fut prise d'une pulsion soudaine, quitta sa veste puis la jeta à ses pieds, si bien qu'elle ne portait plus que sa chemise entrée dans son pantalon. Près du Prince de Somgysaï, elle déclara :

— Hier tu voulais savoir ce qu'était un vrai combat, sans retenir ses coups ? J'en propose un maintenant. Ça devrait te plaire, enchaina-t-elle à Erid, avant de se tourner vers son frère. Vous et moi.

Gabriel la fixa un instant, sous le regard anxieux d'Elio qui les regardait alternativement, comme pour deviner ce qui allait se passer. Finalement, Gabriel hocha la tête en signe d'assentiment.

Inwë récupéra l'épée de son jeune ami et la fit tourner une ou deux fois dans ses mains pour juger de son équilibre, déterminée. Erid s'avança vers eux et posa une main sur l'épaule d'Elio qui s'apprêtait à parler. Le jeune Prince aurait voulu les empêcher mais lui-même savait que c'était inutile.

— Bien, les épées ne sont pas aiguisées, mais on évite toutefois de se crever un œil, n'est-ce pas ? fit Erid, amusé. S'entretuer n'est pas le but présent et le combat finit si l'un des deux est vaincu. Je ne tolérerai aucun débordement.

— Qu'aucun de nous n'attaque dans le dos alors que la fin a été proclamée, c'est ça ? demanda Inwë, rappelant ainsi le premier combat et le coup bas de son ami.

— Tout à fait.

L'intéressé lui fit clin d'œil amusé, pas le moins du monde gêné par cette remarque. Elio allait répliquer quelque chose, mais Erid le retint.

— Laisse-les faire. Ils ont des affaires à régler et les connaissant, ça ira plus vite avec une épée à la main, plutôt qu'en discutant, expliqua-t-il en s'éloignant avec son jeune ami, laissant l'espace libre aux deux combattants.

Gabriel observait Inwë de façon froide et distante, la bienveillance de la veille l'avait quitté. La jeune femme préférait le voir ainsi, c'était bien plus simple pour elle de le détester.

La légende des deux royaumes [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant