Chapitre 26

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Mes yeux parcourent l'écriture enfantine sur le papier. C'est une sorte de poème.

« Où es-tu ?

Existes-tu ?

Est-ce un mystère, une légende que tu as laissée ?

M'as-tu abandonné ?

Moi, je suis sous l'eau et perdue.

Je t'attends, quand viens-tu ?

Tu es une ombre au-dessus de ma tête. Une étoile qui disparaît.

Où es-tu ?

Viendras-tu ?

Est-ce que tu me connais ?

Es-tu seulement dans mon imagination ?

Une fantaisie, une invention ?

Un mystère pour nous sauver ?

Je n'entends que le silence de la mer.

Mes mains s'épuisent, mon espoir est en poussière.

Je m'assois sur le ponton.

Je regarde le ciel, à minuit,

Je relève le menton.

Et je prie. »

Est-ce une lettre d'amour d'une jeune fille désespérée qui attend son âme sur ? Dans ce cas, pourquoi ce mot est-il écrit en érissan ?

Je la relis plusieurs fois, jusqu'à ce qu'une goutte d'eau vienne mouiller le papier. Je ne me suis pas rendu compte que j'étais en train de pleurer. Ça me transperce le cœur. Ce n'est pas un poème, mais une chanson.

Cette lettre m'est destinée, j'en suis convaincue.

Ma semblable m'a attendu. Est-elle encore en vie ?

Pourquoi ai-je la sensation étrange qu'elle a disparu ?

Jared m'a pourtant assuré que notre semblable était en vie et était prêt à m'aider ? Où est cette jeune fille ? M'attend-elle encore ?

Le message de Marshall, le érissan qui est mort dans les prisons de Larn, me revient en mémoire. « Je vais mourir en ayant eu l'espoir de te revoir un jour E. Existes-tu réellement ? Où as-tu disparue à jamais ? »

Mes jambes semblent, d'un coup, refuser de me porter. Les larmes coulent à flots sur mes joues. Pourquoi ai-je le sentiment de les avoir abandonnés ? Ils ont dû se sentir si seuls pendant tout ce temps. Je m'en veux terriblement.

Ils comptaient sur moi et certains sont morts alors que je n'avais même pas conscience de leur existence.

Je sens Inti se contracter contre mon oreille. Le murmure apaisant de la voix d'Ardalôn me parvient.

« Respire, Elwing. Ils comptent encore sur toi. Relève-toi. Trouve-les. »

Je trésaille à chaque fois que sa voix résonne dans ma tête. Il a raison.

Il n'est pas trop tard. Je peux le faire. Je peux trouver cette jeune fille.

Je vais aider les Marins.

Je vais trouver la pierre d'Eris.

*

Il est presque minuit, lorsque je remonte de la crique vers le bar de Jo. Je la croise alors qu'elle vient à ma rencontre.

— Je commençais à m'inquiéter ! Tu n'es pas rentrée avec Nath et Sajjad ? demande-t-elle d'un ton suspicieux.

— Non. J'avais besoin de réfléchir.

Les Conquérants du Cercle T3 -  L'Ordre du SoleilDonde viven las historias. Descúbrelo ahora