Chapitre 44

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J'allonge Daerôn sur une surface lisse du sol rocailleux et plein de sable ocre. Il respire difficilement et je ne sais pas quoi faire. Il n'y a rien sur cet îlot qui puisse m'aider à soulager ce qui lui fait souffrir. Il s'est aventuré bien plus loin que ce qu'il aurait dû. Un kalis n'est pas censé traverser une porte de téléportation comme ce qu'il vient de faire. J'ignore quelles sont les conséquences sur son état physique ou mental. Je touche son front d'une main délicate. Il est brûlant. Son corps commence à trembler légèrement. Je me mords la lèvre. Si j'avais attendu qu'il m'explique la situation, je ne me serais pas enfuie et lui n'aurait pas traversé cette porte, seul. Avec moi, il n'y avait aucune raison qu'il soit dans cet état... Enfin, c'est ce que nous pensions.

Que vais-je faire ? Je ne peux pas le laisser comme ça !

Mes pensées se bousculent dans ma tête alors que le temps me file entre les doigts. Je dois bien pouvoir faire quelque chose ! Je serre les poings de frustration. Comment puis-je l'aider ? Cela ne me sert à rien d'avoir toutes ces capacités. Je ne peux rien faire...

La visite d'Orphée lors des Jeux me revient soudainement en mémoire. Le guide avait parlé d'un îlot sur lequel se trouve un hôpital. Oui, je trouverais sans doute quelque chose là-bas ! Je dois absolument le rejoindre. C'est l'unique solution qui se présente à moi pour le moment.

*

Le frisson qui me parcourt alors que je fais apparition sur un des grands pontons de Totem me laisse un voile froid sur la peau. Je m'empresse de me rendre invisible de peur qu'une sentinelle, me surprenne. Je marche silencieusement sur les grandes artères de bois qui constituent les murailles et les tours de garde de la capitale. J'aperçois les lumières des habitations sur ma gauche. D'après mes souvenirs, l'îlot médical sur lequel se trouve l'hôpital Klène, est en face. J'arrive bientôt à une intersection, construite juste au-dessous dune citadelle de surveillance. Les différents chemins qui s'offrent à moi partent de cette construction en forme d'arche. J'imagine que quelques sentinelles doivent y être postées en plus de celles qui arpentent les ponts de bois.

Je m'engage sous la tour, plongée dans le noir et tourne à droite lorsque, tout à coup, je heurte quelqu'un. Je sens mon illusion basculer un quart de seconde alors que le jeune homme se retourne et se recule de surprise. Je reprends mes esprits et me retourne doucement sans faire le moindre bruit. Je m'empêche de respirer pour me remettre de cette émotion soudaine. J'entends des pas derrière moi, se précipiter pour me rattraper. Je regarde vite dans mon dos et cours à mon tour pour échapper à mon pourchasseur.

Mais il est trop tard.

Une latte de bois, située sous mes pieds se détache soudain du ponton, et me fait trébucher. Je tombe de tout mon long sur le pont. Un peu sonnée, je tourne la tête pour évaluer mes chances de m'échapper. Mon visage rencontre d'abord deux bottes en cuir marron. Je relève les yeux vers le visage du jeune homme alors qu'un malaise commence à me faire tourner la tête.

J'ouvre la bouche, choquée de l'identité de mon assaillant.

Bélèm se tient devant moi, les sourcils froncés. Il se penche vers moi avec un regard curieux alors que les pans de sa cape de sentinelle se referment sur lui. Il s'agenouille pour m'observer calmement et je nose pas dire un mot tandis que je prie pour que sa mémoire soit défaillante.

— Je savais bien que ce visage ne m'était pas inconnu, déclare-t-il, la tête penchée.

Sur toutes les sentinelles des pontons, il a fallu que je tombe sur lui. J'aurais dû my préparer. Ça m'aurait évité cette surprise qui m'empêche de me redresser.

— Que fais-tu ici ? Est-ce sur Orphée que tu te cachais ? J'ai pourtant effectué une surveillance accrue ces derniers mois.

Je cligne des yeux alors que j'essaye de comprendre ce que ses paroles signifient. Bélèm, m'a-t-il cherché ? J'essaye de lui répondre, mais une migraine atroce s'installe dans ma tête.

Les Conquérants du Cercle T3 -  L'Ordre du SoleilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant