Chapitre 45

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La tête de Daerôn repose sur mes genoux. Je pensais que les six heures dont Bélèm a besoin pour trouver un remède passerait plus vite, mais finalement, après une heure d'attente, je suis retourné sur l'îlot pour vérifier l'état de Daerôn. Je ne pouvais pas m'éterniser sous mon voile d'illusion plus longtemps. Je reviendrais sur le ponton dès qu'il sera réveillé et que je lui aurais expliqué la situation.

Veiller quelqu'un à quelque chose de rassurant et d'angoissant à la fois. Je suis soulagée d'être présente à ses côtés parce que je serai là à son réveil. Mais, j'ai si peur de devoir m'en aller quand le temps imparti sera écoulé. Et s'il ne se réveillait pas ? Cette pensée terrifiante prend rapidement forme dans mon esprit et je narrive pas à la chasser. Mon cœur s'emballe sous l'inquiétude et une boule pesante vient élire domicile au fond de ma gorge. Jamais je ne pourrais supporter le fait qu'il meure pour avoir cherché à se réconcilier avec moi. J'aurais de loin préféré que nous restions en froid si je savais qu'il resterait en bonne santé. Pourquoi a-t-il fallu qu'il me rejoigne ? Huki aurait dû se montrer plus persuasive. A moins qu'il ne l'y est forcé ?

Nous venons à peine de commencer une histoire commune qu'il y a déjà des péripéties qui me rendent impuissante. Je n'ai malheureusement pas hérité du pouvoir de Torelle... Je comprends pourquoi ce peuple s'est refermé sur lui-même, caché sur sa lune. Leur pouvoir est si convoité qu'ils ont réussi à le transformer en moyen de pression auprès d'Aegnor pour garder leur liberté.

Daerôn se met à toussoter et je me sens tiré de mes angoisses. Je prends son visage entre mes mains alors qu'il ouvre lentement les yeux. Sa respiration est encore faible et sa voix est rauque lorsqu'il s'adresse à moi.

— Que m'est-il arrivé ? Je me sens mal...

— Tu n'aurais pas dû traverser cette porte, ton énergie est très faible, j'explique avec douceur.

— Pourtant, je ne regrette rien, affirme-t-il.

J'observe son visage entre mes mains, j'approche l'une d'elle de son front. Il est encore chaud. Je fronce les sourcils d'inquiétude. Il reprend :

— J'ai longtemps espéré être à tes côtés de cette façon, même si les conditions ne sont pas idéales pour le moment.

Je ne m'arrête pas sur ses paroles qui sont censées m'apaiser. Je commence à le connaître maintenant. Il ne se plaindra pas outre mesure pour que je ne stresse pas. Je passe ma main dans ses cheveux emmêlés alors qu'il me détaille de ses yeux dorés.

— J'ai cherché à m'introduire dans l'hôpital de Totem après ton malaise et j'ai croisé Bélèm. Il est en train de chercher un antidote pour que tu ailles mieux.

Il se redresse rapidement et je n'ai même pas le temps de l'accompagner dans son geste. Il ferme les yeux de douleur et se masse les tempes.

— Tu as vu Bélèm ?! Tu lui as parlé ? demande-t-il avec intérêt.

— Oui, je réponds tandis que je lui masse le dos d'une main inquiète.

— Je n'ai pas eu le temps de t'expliquer pourquoi nous devions nous rendre sur Orphée, commence-t-il d'une voix faible.

— Daprès ce que j'ai compris, nous y sommes pour trouver un moyen de soulever les pierres qui se trouvent au fond de la baie Malorelle, puisque j'en suis incapable.

— C'est un bon résumé, affirme-t-il. Mais il te manque plusieurs informations. Laisse-moi...

— Tu vas t'épuiser à tout me raconter, Daerôn, je le coupe d'un ton ferme.

Il s'éponge le front avec le tissu de son haut, ce qui me laisse entrevoir ses abdominaux saillants, couverts de sueur. Sa température a dû encore augmenter... Je mets une main sur son bras et je convoque une vague de froid pour l'apaiser. Il se tourne vers moi avec un mince sourire.

Les Conquérants du Cercle T3 -  L'Ordre du SoleilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant