Chapitre 13

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Du plus moins qu'elle se souvienne, Daphne avait toujours voulu être marionnettiste. Ce fut là d'ailleurs son seul souhait considérée comme étrange pour une petite fille de son âge. Lorsqu'elle reçut en cadeau de petites marionnettes, elle s'en était donner à cœur joie pour les faire tournoyer au rythme du piano des voisins. C'était une sorte de danse hypnotisante et fascinante.

Lorsque sur la scène du cirque, un mannequin cireux à taille humaine descendit alors du plafond, soutenus par des fils fins et invisibles, elle ouvrit de grands yeux d'enfant. Une trompette tonna et le spectacle commençait. Les projecteurs qui éclairait le public se figèrent au centre de la piste. Dans un saut périlleux une silhouette féminine atterrit près du mannequin et se releva avec autant de grâce que d'élégance. Elle leva la tête et Daphne la reconnut, c'était la fille rousse aux yeux de chat. Vêtue d'un ensemble vert brodée, elle balaya l'assemblée du regard, plissa les paupières à la vue de Daphne et aussitôt se détourna vivement.

Un roulement de tambour retentit dans le chapiteau lorsque la rousse effleura du doigt le torse du mannequin. Comme par enchantement, cela lui insuffla la vie car il se mit à bouger, à s'étirer. Aux rythme de la batterie, il tendit le bras à l'artiste à ses côtés. La rousse s'empara de la main de cire et d'un pas se plaqua contre son torse. S'ensuivit alors une danse, les mouvements des deux danseurs étaient vifs, les regards échangés étaient intenses. D'un tournemain, il lui permit de s'élancer dans les airs pour saisir le trapèze qui se balançait. Mais elle ne parvint pas à s'agripper et chuta. Seulement, avant l'impact au sol, la femme s'évapora pour laisser sa place à... Daphne!

De stupeur, elle cria. Mais le mannequin cireux lui sourit gentiment. Ses yeux noirs identiques aux siens luisaient d'une lueur nouvelle. Puis délicatement, il lui ôta la capuche qui cachait ses cheveux et son large manteau. Il jeta à terre les lunettes, brisant les verres par la même occasion et retira l'épingle lui retenant ses cheveux qui dévalèrent son dos.

-Vous voilà donc.. Daphne Merin..., murmura le mannequin.

Elle tiqua à l'entente de son prénom? Comment la connaissait-il? Il lui était pourtant inconnu. Sans tergiverser, il s'empara doucement de sa main, et lui enserra la taille. La jeune fille, affolée à l'idée de se produire resta figée lorsqu'il l'invita à danser; elle possédait de piètre qualité dans ce domaine. Mais le mannequin la fixa longuement de ses orbes sombres et d'un sourire, l'incita à le joindre. Contre son gré, elle se laissa entraîner et petit à petit, prit du plaisir à se laisser guider par ce danseur hors-pair. Elle serrait dans sa petite main dans la sienne et il la fit tourner sur elle même. Mais malgré tout, ses habits l'empêchaient de se mouvoir avec souplesse. Ce fut lorsqu'il la propulsa dans les airs qu'elle prit réellement peur mais elle échangea de nouveau de place avec l'artiste rousse qui retomba féline sur ses pieds non sans avoir effectué quelques pirouettes acrobatiques.

-Attends, tu viens d'aller sur scène! Tu connais les artistes? Demanda Erika.

À dire vrai, Daphne était encore sous le choc. Dépouillée de son manteau, elle était démasquée et eut un peu froid. Sur scène, le mannequin s'était de nouveau immobilisé, la femme rousse le recouvrit d'un drap écarlate et le fit disparaître. Lorsqu'elle s'apprêta à son tour à tirer le drap sur elle, la femme aux cheveux de feu décrocha la plume de paon qui ornait sa ceinture et la jeta en direction du centre du chapiteau. Elle se volatilisa, laissant des volutes de senteurs parfumées derrière elle. Les percussions cessèrent de jouer et le silence se fit.

Timidement, quelques applaudissements suivit progressivement de spectateurs en délire. C'est à ce moment que Daphne se demanda les raisons pour lesquelles elle était apparu sur scène. Une touche de piano fit vibrer la foule et la sortit de ses pensées. Les touches blanches et noire du majestueux instrument luisaient à la lumière. Assis devant, sur le petit banc qui servait de siège, Icare se tenait droit. Les cheveux blonds et aveuglants, sa beauté était à couper le souffle. Erika semblait sourire à son apparition, certainement l'admirait-elle aussi. Semblant ignorer tous les regards, Icare créait de ses longs doigts une mélodie exquise qui leur ravissait les oreilles. Daphne pencha la tête de côté et se demanda si l'illusionniste allait de nouveau les faire voyager.

Mais elle eût rapidement sa réponse lorsque les lumières éclairèrent une petite fille, suspendue sur un solide perchoir. Daphne la reconnut aussitôt, c'était la petite fille qui se tenait, il y a un an de cela, dans le bureau auprès d'Owl, vêtue d'une robe immaculée. Elle avait grandi et arborait, pour ce numéro, une longue tunique rose pâle qui flottait au gré de ses mouvement. Guidée par les notes de piano, elle s'élança avec autant d'aisance que si elle eut été sur la terre ferme. Elle exécuta quelques acrobaties avant de rejoindre un autre perchoir avec agilité et grâce. D'un geste souple, elle se maintint sur la corde raide et fit l'impensable. La fille décrocha de ses mains blanches l'attache d'un des perchoirs qui tendait la corde et enroula celle ci le long de son poignet. L'angoisse du public montait crescendo, tout comme la musique qui devenait de plus en plus angoissante. La jeune artiste marchait dorénavant tranquillement sur une corde lâche. Daphne se frotta les yeux d'émerveillement, elle qui pensait que le Cirque Mystique n'avait plus de secret pour elle! Il fallait bien reconnaître que les numéro se renouvelaient, originaux et poétiques. Magique!

Le Cirque MystiqueOù les histoires vivent. Découvrez maintenant