Partie 28 : Hamburgers

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3, 4 et 5

3, 4 et 5 sont en arrêt devant un distributeur de hamburgers. Plus exactement ils sont plaqués contre la vitre. Ils ont faim.

Ils ont passé leur première nuit à Ambton dans la cabane de jardin d'un particulier et comptaient y retourner la nuit suivante, mais ils se sont perdus et ont dormi dans un hall d'immeuble. 3 ne voulait pas qu'ils entrent dans un appartement, malgré la facilité avec laquelle ils auraient ouvert une serrure tech. Et comme Ambton est une ville immense, les voilà à nouveau égarés.

Ils ont mangé grâce à l'argent que Josh leur avait donné. Ce matin ils ont donné le reste à leur tour à une femme et son bébé mourant apparemment de faim. Du moins c'est ce qu'elle a dit. Plus tard, ils en ont rencontré beaucoup d'autres comme ça, racontant des histoires toutes plus émouvantes les unes que les autres... Soit ils mentent, soit Ambton est une ville bien plus pauvre qu'ils ne l'avaient imaginée. Ce qui ne résout pas leur problème immédiat : comment obtenir à manger sans argent ?

Le distributeur est géré par un ordinateur tech et connecté au Réseau. Ils peuvent donc lui donner des ordres. Ils peuvent aussi entrer dans le programme d'une banque et créer un compte qu'ils rempliraient d'argent fictif. Sauf que tout ça serait du vol et 3 soutient qu'ils n'ont pas à voler, un point c'est tout.

Énervée, 5 lui rappelle qu'ils n'ont jamais demandé à être ici. Ils ont toujours respecté les règles des humains puis les humains ont détruit leur maison sans avertissement. Leur voler à manger n'est que justice, voir même une très faible réparation.

Coincé entre ses deux sœurs, 4 tente de ménager la chèvre et le chou. 5 crépite de colère, son propre plaidoyer l'a convaincue et elle expose chaque argument dans une onde mentale agressive qui martèle la conscience des deux autres. 3 refuse obstinément de se disputer mentalement et tente d'enfoncer son opinion dans le crâne de sa sœur en la répétant sur un ton beaucoup trop hostile pour être écouté. 4 tente de relativiser : ce n'est qu'un hamburger, ce n'est pas quelque chose de très important mais ils en ont un besoin urgent, ça ne fera de mal à personne.

Le regard que lui adresse 3 pourrait lui brûler les yeux jusqu'à l'arrière du crâne et sans s'en rendre compte il recule d'un pas. D'accord. C'est une question de principe. Je n'ai rien dit.

5 continue à se bagarrer. Peut-être qu'elle agit ainsi pour le plaisir de se passer les nerfs et d'oublier un instant leur situation précaire et ses angoisses, peut-être pour ne pas laisser 3 décider seule de ce que diraient les professeurs dans cette situation, 4 n'en sait rien et il n'a pas le courage de fouiller son esprit survolté pour le savoir. Trop dangereux. Il s'écarte. Il regarde par terre dans la rue, dans l'espoir de trouver une carte de t-crédits qui avec quelques copines à elle arrangeraient leur problème... Évidemment, ce serait temporaire, mais toute tentative de paix est temporaire entre 3 et 5. Elles ont des caractères trop opposés tout en étant aussi têtue l'une que l'autre. Pourtant chacune est prête à tout pour aider l'autre. 4 se demande fugitivement si les familles d'humains normaux sont comme ça aussi.

4 frissonne. Dans sa colère 5 a envoyé le long du Réseau l'équivalent mental d'un coup de poing dans un mur. L'effet se disperse avec la distance mais le garçon est inquiet. Là, il lui faut de l'aide.

Il arrête un homme qui paraît moins pressé que la plupart des autres et lui dit :

« Monsieur, est-ce que vous pourriez me donner de l'argent ? Sinon mes sœurs vont s'entretuer et il va y avoir des entrailles partout.

4 n'a jamais lu ou vu d'histoires d'horreur mais il aime la sonorité du mot entrailles, c'est à son avis bien plus drôle pour décrire un massacre que le mot sang. L'homme paraît de son avis. Il s'écarte en entendant la première phrase puis sourit. Il en a vu d'autres, des enfants qui réclament de l'argent, quoiqu'ils sont plutôt charmeurs et baratineurs ou francs et agressifs. Charmeur et franc, c'est plutôt rare. Il pourrait s'écarter... mais il n'est pas pressé. Les histoires des enfants des rues valent souvent plus qu'un scénario de cinéma. C'est alors qu'il remarque que l'enfant en question est habillé de luxueux vêtements techs à la dernière mode.

Les Techs - Tome 1 : les secrets du LaboratoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant