Partie 52 : dangers

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Dis bonjour à la caméra

Qui regarde où tu vas

Si tu te trompes, gare à toi

Ou la SRAM te retrouvera

Et elle TE MANGERA.

Graffiti retrouvé sur les murs d'une station de métro de Naval, 2110



7

Lorsque la présence parle pour la première fois à 7, la petite fille est soulagée.

Depuis qu'elle a quitté l'île, elle a l'impression que la présence est sa compagne quotidienne, son ombre, un éternel mouvement perçu du coin de l'œil et invisible dès qu'elle tente de se retourner. Cette chose est pire qu'un croque-mitaine, les monstres cachés sous le lit ont eux la décence de disparaître quand s'allume la lumière. La présence quant à elle ne disparaît jamais totalement, et 7 était en train de devenir folle de terreur, une folie qui la gagnait goutte à goutte, seconde après seconde, comme un lent et implacable poison. Et voilà que la chose lui parle. 7 trouve que c'est mieux comme ça.

Au début, la voix lui dit simplement : 7, tu es 7, la septième enfant. Cette pensée est l'écho parfait de l'esprit de la fillette, un reflet minutieux où chaque facette de l'enfant est intégrée dans un juste équilibre avec les autres. Jamais aucun de ses frères et sœurs, qui pourtant la connaissent si bien, n'a réussi à penser à elle d'une manière si totale et si juste. Si 7 avait été plus âgée, elle aurait été effrayée à l'idée que cette chose indéfinissable parvienne à la calquer aussi précisément. Mais 7 ne se soucie guère du comment et encore moins du pourquoi : la voix lui parle et elle n'a plus rien de menaçant, la voix la connaît et semble collée à son esprit, la voix est même rassurante. La présence n'a plus d'importance, puisqu'elle est pacifique, il n'y a plus de présence, plus de chose, plus de monstre, il y a la voix.

7 petite 7 nous avons besoin de toi.

Ce "nous" est bizarre. Il paraît désigner autre chose que plusieurs personnes. Un "je" qui serait déguisé en "nous", comme si la voix essayait d'adapter sa pensée pour se faire comprendre de 7. La fillette hésite et brusquement reconnaît ce qu'elle a d'abord compris comme étant un "nous". C'est une union d'esprits, comme elle et les autres en ont eu au moment de décider ce que chacun allait faire une fois sorti de l'hélicoptère. L'union qui lui parle est formée depuis très longtemps, tous les "je" ont fusionné dans un "nous" qui à son tour est devenu un immense "je", un seul être infiniment complexe. Et lointain. 7 sent qu'elle n'entend que l'une de ses nombreuses voix, une pensée tendue par une immense énergie dont elle ne perçoit que les échos. En répondant à la voix, elle ajoute une tonalité bienveillante envers cet immense être fusionné qui l'appelle de si loin.

Je suis là. Dites-moi de quoi vous avez besoin.

Un pont petite 7 nous avons besoin d'un pont pour venir jusqu'à vous tout est trop étranger trop loin trop d'interférences qui nous détruisent il nous faut un pont 7.

Un pont pour quoi faire ?

Un pont d'esprits ! termine la voix en jetant ses ultimes forces.

Elle disparaît. Après tous ces jours à s'accrocher à 7, à voir par ses yeux, à entendre par ses oreilles, à ressentir par son cœur et à comprendre par son cerveau, voix et présence s'enfuient, ne laissant qu'un grand vide et l'écho d'un soulagement.

Les Techs - Tome 1 : les secrets du LaboratoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant