Chapitre 97

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« Et puis enfin, je respire », Auteur inconnu

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Hier, Gabin a passé tout le reste de la journée avec moi et nous sommes restés enfermés dans ma chambre. Après qu'AR soit partie, lorsque mes larmes ont cessés de couler, je n'ai plus pleuré. Pas que l'envie m'en manquait, mais mon état physique m'en empêchait : j'avais très mal aux yeux, et aux environs de 16 heures, Gabin m'avait apporté sur un plateau des cachets « pour ma jambe » il a dit. Mais trente minutes plus tard je me suis endormie et ce n'est qu'aux alentours de 3 heures du matin que je me suis réveillée. J'en conclus donc qu'il n'y avait pas que des antidouleurs parmi les comprimés.

Je lui en suis néanmoins reconnaissante car si il n'avait pas fais ça, je ne crois pas que j'aurais pu fermer l'œil de la nuit. Puisque, lorsque je me réveille au petit matin, il est impossible de me rendormir. Tout semble s'écrouler.

Lau est morte.

Je presse fortement les paupières de douleur, de colère. Mais Beaucoup plus de colère que de peine. Je suis en colère contre AR pour avoir formulé la phrase dont je n'osais même pas imaginé le début, car ça aurait rendu concret tout ce qui se passait pour moi. Etrangement ce flou dans lequel je semblais nagée à mon réveil semble n'avoir jamais existé.

Ma tête me fait tellement mal que j'ai l'impression qu'elle va exploser. Bien entendu, ce n'est pas le moins du monde étonnant, vu le nombre d'heures que j'ai passé à pleurer. Et je sais que ce n'est pas terminé. La preuve se trouve dans le fait que j'en ai envie, mais je n'y arrive pas. N'importe où mon regard se pose, l'écho de la voix de Lau ou alors l'effluve de son parfum me parviennent. Ça m'électrisent, me foudroient et au final, ils viennent creuser plus profondément l'abîme qui semble avoir élu domicile dans ma poitrine. Partout dans cette chambre, Lau est venue, nous avons souvent discutés, nous nous sommes disputés, rigolés, joués...

C'est la première fois de ma vie que je perds quelqu'un. Cette sensibilité, cette douleur, cette colère, cette peine, c'est nouveau et effrayant parce que j'ai l'impression que je ne fais que tomber. Et la pente m'a tout à fait l'air encore longue. C'est étrange de se dire qu'on ne reverra plus jamais une personne de notre vie, et que la tristesse que l'on ressent se transforme en douleur qui nous empêche de respirer, de parler, et qui nous laisse aller à un torrent de larmes qui semble ne jamais s'arrêter, si ce n'est que par intermittence.

***

- Bonjour, dis-je aux filles attablées dans la salle à manger lorsque je fais mon entrée. Le silence qui régnait bien auparavant avant mon arrivée se mue en un calme religieux. Elles me regardent toutes d'un air étonné, comme si me voir là était la dernière chose à laquelle elles s'attendaient.

Je ne me formalise même pas du fait qu'elles ne me répondent et prends place entre AR et Stéphanie.

Un nœud se forme dans ma poitrine à la vue de la chaise vide en face de moi c'est la place de Lau.

C'était.

- Tu veux des crêpes ? , me demande Joyce rompant le silence ainsi que ma contemplation de la place vide.

Je lui sourie, ou du moins essaie, et hoche la tête. Elle m'en sert tandis que je prépare mon thé. AR à ma droite se racle ma gorge et je comprends par là qu'elle va prendre la parole :

- Comment va ta jambe ?

J'hausse les épaules.

- J'ai connu mieux, mais ça va

Elle ne réplique pas et je commence à manger. Même Stéphanie et Danielle d'habitude très bavardes ne disent rien.

- Au fait Gillian, tu es convoquée au bureau d'Elona, fait Gaia.

NEAWhere stories live. Discover now