TERRIENNE (édité)

Chapitre 2

La porte du placard dans lequel nous nous trouvons est fermée. Je la pousse doucement du bout des doigts, de quelques centimètres à peine. La lumière pénètre légèrement dans l'habitacle, me permettant de voir un bout de l'intérieur du vaisseau.

-Oh punaise...

Un homme gît au sol, à deux mètres de là, étendu dans une marre de sang. Ma main se met à trembler devant moi lorsque je reconnais le docteur Mensfill et la blouse blanche qu'il ne quitte jamais. On entend encore les coups de feu au loin, mais je ne sais pas d'où il proviennent. Alors, ils nous tirent dessus, sans savoir qui nous sommes  ?

Hunter se penche par-dessus mon épaule pour apercevoir à son tour ce qui se déroule.

-La voie est libre  ?

Je plisse les paupières afin de mieux voir. Rien ne semble bouger dans mon champ de vision.

-Je crois. On y va.

Je m'apprête à sortir, mais le garçon brun me retient.

-Attends. Où est-ce qu'on va, déjà  ?

-Chez moi. C'est à quelques minutes d'ici, seulement.

Je fronce les sourcils à l'entente de mes propres mots. Je sais que ce n'est clairement ni l'endroit ni le moment pour y penser, mais je ne peux m'empêcher de me demander quelque chose. Pourquoi, lorsque mon père travaillait sur la navette en direction de Terre, ne rentrait-il pas plus souvent chez moi  ? Il n'était pas si loin, pourtant. Est-ce trop dur pour lui de vivre avec sa famille  ? La haine que j'éprouve me fait serrer sans que je n'en prenne conscience mon poing.

-OK, je te fais confiance, alors, soupire Hunter, me ramenant à la réalité.

Je passe une mèche de mes cheveux derrière mon oreille et réajuste le pull que je porte, avant de souffler longuement. J'ai beau tendre l'oreille, il n'y a plus aucun bruit. Peut-être que ceux qui nous ont attaqués sont partis  ? Je l'espère au plus profond de moi. Je n'ai réellement pas envie de devoir fuir à nouveau. Au moins, chez moi, nous pourrons être à l'abri et penser à un plan.

Je pousse à nouveau la porte, qui s'ouvre entièrement, cette fois, et je me rue à l'extérieur, rasant les murs. Hunter me suit et bientôt, nous nous trouvons hors du vaisseau, le pied sur Neuf. Le spectacle qui se déroule sous mes yeux me fige un instant, nouant ma gorge. Je secoue la tête et regarde tout autour de moi. Il n'y a personne ici.

-C'est parti, murmuré-je. Suis-moi.

La base spatiale de Neuf est assez petite et simple. Elle est composée de deux pistes d'atterrissage et de décollage, ainsi que d'un poste de patrouille gardé par les Amiraux. Ce bâtiment sert d'entrée et de sortie de la base. A droite de celui-ci, il y a seulement un grand hangar qui permet de réparer les vaisseaux qui vont vers les autres planètes et de stocker les navettes. La dernière fois que je me suis rendue ici, des techniciens s'affolaient et s'affairaient dans tous les sens. Aujourd'hui, l'endroit est désert  : les flammes sont désormais seules habitantes de ce lieu, et cela ne me rassure pas le moins du monde.

Nous nous dirigeons vers le poste de garde en courant, vérifiant encore autour de nous qu'il n'y a personne. Puis Hunter presse la poignée qui nous mène à l'intérieur du bâtiment.

On se croirait dans un de ces films dont Noam m'a parlé, sur Terre. Post apocalyptique, il me semble. Les vitres sont brisées, éclatées, fissurées par les balles. Le comptoir à ma droite est détruit, les papiers éparpillés au sol. Une flaque rougeâtre coule devant moi, et je frissonne.

Mais que se passe-t-il, ici  ?

Je me doute bien qu'il s'agit d'un conflit, mais du quel  ? Contre quoi  ? Par qui  ? Les questions nombreuses qui inondent mon esprit sont sans réponses, et cela me fait paniquer petit à petit. Il faut que je sorte d'ici. Que je revoie ma maison, que je retrouve quelque chose qui me rappelle ma vie sur cette terre. Alors j'avance, marchant sur les bouts de verre qui crissent sous les semelles de mes chaussures, et rapidement, je me retrouve dehors à nouveau. Hunter est silencieux à mes côtés, mais je suppose qu'il se pose les mêmes interrogations que moi.