Chapitre 11

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Je me redresse au son du « trois » et m'élance. J'ai à peine fait quelques mètres qu'une rangée de rondins de bois m'attendent sur mon chemin. Je ne prends pas le temps de me poser des questions, et j'enjambe les obstacles. Un, deux, trois, quatre, cinq. Mon souffle est régulier pour l'instant, mes yeux sont rivés sur la prochaine épreuve que je dois affronter : un tonneau allongé de tout son long. Il doit faire près de deux mètres de haut.

Sans hésiter, je m'appuie à l'aide des bras sur le flanc du tonneau, et je passe ma jambe droite par-dessus. Je me retrouve à califourchon sur cet objet immense, me relève aussitôt et cours jusqu'à la suite du parcours. Au bord du tonneau, il y a une sorte de rond noir, que je n'arrive pas à identifier comme étant un simple cercle ou un trou profond. Mais nous sommes dans une réplique du Parcours, et l'on ne sait jamais ce qui peut réellement arriver.

Je ne sais pas où est Hunter exactement, mais j'entends ses pas derrière moi ; il va bientôt me rattraper. Mes poings se serrent d'eux-mêmes tandis que le garçon se rapproche. Je saute. Je ne saute pas. Que dois-je faire ? Je repère une chaise juste derrière le cercle noir. C'est peut-être risqué de sauter, mais je dois le faire.

Sans réfléchir plus longtemps, je saute en poussant de toutes mes forces sur mes maigres jambes ; j'arrive presque au tabouret, le heurtant de plein fouet en m'étalant au sol.

-Aoutch. Brume ? Tu vas bien ?

La voix moqueuse de Hunter résonne à mon oreille. Je lui réponds d'un grognement qui le fait rire avant de poursuivre. Je suis arrivée à une pyramide en fer que je m'apprête à escalader lorsqu'un cri retentit dans mon dos. Surprise, je me retourne, cherchant Hunter des yeux sans parvenir à le trouver.

Ethan entre dans mon champ de vision en courant vers le cercle noir de tout à l'heure.

-Hunter ? Hunter, tu m'entends ?

Le garçon blond s'approche du rond et s'y accroupit. Je le rejoins le plus vite possible, hors d'haleine et inquiète. C'était bien un trou, finalement.

-Il est tombé là-dedans ?

Ethan hoche la tête.

-Il sait pourtant que ce ne sont pas de simples cercles. Tout le monde le sait. Hunter ?

J'ajouterais bien que non, je ne le savais pas, mais je me retiens. Tout au fond du trou, un grognement résonne, suivit d'une série de toussotement.

-Ouais, ouais je vais bien. J'arrive les gars.

-Besoin d'aide ?

Au moment même où Ethan finit sa question, le garçon brun revient, semblant collé à la paroi du trou noir. Son visage est recouvert de suie et ses cheveux de poussière.

-Y'a une échelle dans ce trou, c'est cool, rie-t-il.

Puis il se relève et se met à courir, nous bousculant Ethan et moi. Il fait quelques pas et se retourne, sans s'arrêter pour autant.

-Alors Brume, qu'est-ce que tu attends ?

Je lui adresse un sourire espiègle et me lance à sa poursuite.

-Tu triches Hunter !

Le brun lève les bras comme s'il était désolé. Je le rattrape en quelques foulées. Nous sommes au même niveau lorsque nous passons la pyramide en fer, puis nous arrivons tous les deux devant une échelle de corde tendue à l'horizontale. Je me stoppe pour visualiser la suite du parcours et reprendre mon souffle. Hunter s'empare de l'échelle et grimpe dessus. L'échelle tangue, il menace de tomber plusieurs fois mais se rattrape. Je me retiens de tenter de le déstabiliser.

Les muscles de ses bras sont tendus, sa mâchoire serrée. Il essaye de garder l'équilibre avec difficulté.

-Tu comptes y passer la journée, sur ton échelle ? me moqué-je.

-On verra quand ce sera ton tour, Brume, répond-t-il, les dents serrées.



Il finit par descendre de l'échelle et s'écroule au sol, à court de souffle et de forces. Je secoue les mains. Bon. Je dois trouver un moyen de passer en peu de temps pour pouvoir rattraper Hunter. Je jette un coup d'œil au garçon de l'autre côté de l'échelle. Il a les yeux fermés, les bras ballants. « Et sans perdre d'énergie ni de forces », ajouté-je pour moi-même.

J'attrape un bout de la corde, qui penche de mon côté, et je grimpe dessus en tentant de rétablir mon poids des deux côtés de l'échelle. Mauvaise idée. La corde vacille. Je dois trouver un autre moyen, et vite.

Une image me vient soudainement en tête ; une que ma mère m'avait montré d'une créature terrestre qui rampe pour se déplacer. Je me mets sur le dos, au milieu de l'échelle entièrement en corde et je m'agrippe aux côtés. Je pousse à l'aide de mes bras et de mes jambes. L'échelle reste stable, et j'avance vite, plus vite que Hunter. J'arrive en quelques secondes à terre, alors que le brun vient juste de repartir. Aussitôt, je me remets à courir. Mes muscles commencent à me tirer, mais je m'en fiche.

Le souffle commence à me manquer lorsque j'arrive devant le dernier obstacle : un mur de quatre mètres de haut, qu'il faut escalader. Cette fois, je ne me préoccupe pas de savoir où se trouve Hunter : je commence tout d'abord par chercher le meilleur moyen de monter.

-Réfléchis bien, Brume, me lance Ethan dans mon dos.

Je lui adresse un regard ; il me fait un clin d'œil en retour, les bras croisés.

Je me concentre sur les cailloux qui permettent de monter. Cette fois, ils sont plus nombreux à droite et montent vers la gauche avant de s'arrêter. Je décide de suivre les plus gros.

Je suis arrivée à la moitié du mur lorsque j'entends Hunter échapper un cri, au-dessus de moi. Le temps de grimper en haut du mur à ses côtés et je vois ce qui l'a surpris. De l'eau. Il y a de l'eau en bas du mur. Et derrière, à une distance de trois mètres, un drapeau rouge vif qui nous attend.

Sans même savoir s'il y a beaucoup d'eau ou non, j'enlève mon pull, mes chaussures et mes chaussettes, et je saute ; j'entends Hunter me hurler que je suis folle.

Il se passe une demi-seconde avant que je touche l'eau dans un bruit énorme. Une demi-seconde durant laquelle je me demande si c'était une bonne idée ou pas de sauter. Le liquide transparent entre dans mes yeux que je n'ai pas eu le reflex de fermer, dans ma bouche, mon nez. Je réapparais à la surface au bout d'un moment qui me semble être long en crachant et toussant de l'eau. Je lutte avec mes bras pour rester la tête hors de l'eau.

-Vas-y Hunter, l'eau est bonne ! lui dis-je pour rire une fois que j'ai retrouvé mes esprits.

Il semble hésiter quelques secondes et retire lui aussi ses chaussures avant de s'approcher du bord. Je réalise que c'est l'occasion ou jamais de gagner. Je brasse des bras jusqu'au bord et sors de l'eau lorsque je l'entends crier en tombant. Il ressort quelques instant après, le souffle coupé, ruisselant, un grand sourire aux lèvres.

Maintenant hors de l'eau, je parcoure le plus vite possible la distance qui me sépare du drapeau et je le brandit haut devant moi.

Ethan nous rejoint avec deux serviettes sèches.

-Bien joué, Brume, me félicite-t-il. De mieux en mieux. En continuant comme ça, tu peux largement réussir à finir ton Parcours.

Je lui souris en retour.

TERRIENNE (édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant