Chapitre 11-2 : Ne dis rien

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Cet après midi précédant la rentrée de l'académie Hélios restera gravé dans les mémoires. Maintenant, nous accueillions M. Maddeles, spécialiste des Mutants...

Je respirais profondément. Je laissais le temps aux nouvelles de s'immerger en moi et... non. Ce n'était pas possible ! J'allais craquer ! Comment toutes ces informations avaient-elles pu fuiter ? Pourquoi avais-je hérité de ces yeux ? En même temps, à quoi d'autre pouvais-je m'attendre !

L'évocation du meurtre m'emplit d'effroi. Je revoyais le corps sans vie du libraire, entendant presque ses mâchoires claquer à proximité de mes tympans. Lucy posa une main réconfortante sur mes épaules, ce qui me fit sursauter. J'étais une vraie boule de nerfs.

– Ce n'est peut-être pas le meilleur moyen de faire sa rentrée, mais ça aurait pu être pire...

Je levais un sourcil effronté.

– D'accord, ça n'aurait pas pu être pire, admit-elle. Mais vois le bon côté des choses, ils ne nous soupçonnent plus, c'est déjà ça. C'est la manticore qui a tué le libraire.

J'observais les alentours, cherchant à savoir si quelqu'un m'avait repéré. Seul Claire me regardait, d'un air intimidé. Je lui adressais un sourire doux que j'espérais rassurant. Elle respira profondément, puis lança sa question.

– C'est vrai ? Tout ce qu'ils ont dit, c'est vrai ?

Sa mère, ma tante, m'observait également d'un air incrédule.

– Oui c'est vrai, admis-je. Et pour le Mutant...

– Allons-y ! me coupa fortement Nathan. Je suppose que vous avez encore beaucoup de travail, je ne voudrais pas retarder votre rentrée. Excuse ma fille pour cette question trop personnelle, Amy.

Il jeta un regard perçant à Claire, qui se mura dans le silence. Elle se leva, entraînant ses cadets avec elle. Nathan en profita pour m'indiquer qu'il voulait me parler. Je m'approchais de mon oncle, tandis qu'il observait l'environnement d'un œil méfiant.

– Amy, j'aimerais que tu ne parles de ce qu'il s'est passé à personne, pas même à Hélios, grinça-t-il entre ses dents.

– Pourquoi ? demandai-je, incrédule.

– J'ai changé d'identité. Mais si mon action venait à s'ébruiter, cela pourrait nous mettre en danger, aussi bien ta mère que moi.

– Pourquoi vous ne voulez rien nous dire ? lançai-je avec fureur. On a le droit de savoir !

– Crois-moi, il vaut mieux que tu ne saches pas, et je sais que Mélissa pense pareil.

– Mais... protestai-je.

– Amy, s'il te plaît !

– Il a raison, intervint ma mère. Et je ne veux pas que tu saches Amy, pour ton propre bien.

– Maman ! objectai-je de nouveau.

– Je ne veux pas savoir, ce sujet est clos ! s'énerva ma mère.

A ce moment, j'étais certaine que la crise de ma mère avait un lien avec cette histoire. Mais lequel ? Quel secret si grave pouvaient-ils cacher ? Jamais je n'avais vécu une semaine aussi mouvementée avec autant d'événements, aussi effroyables soient-ils. Et je n'avais jamais été tant effrayée.

Je suivis les autres hors du restaurant, en prenant soin de cacher mes yeux aux passants. Lucy marchait à mes côtés, le nez dans son téléphone. 

Soudain, elle poussa un « Quoi ? » d'indignation, et me présenta son téléphone. Je reconnaissais le profil de Benjamin sur les réseaux sociaux. Lucy m'indiqua la photo qu'il avait posté, avec un couteau et du sang. Un peu kitch, tape-à-l'œil. L'effet recherché.

– "La prochaine fois que je croise cette sale pute, je la défonce", lut mon amie.

– Ils sont sérieux ? m'exclamai-je avec stupeur. Je n'y crois pas, c'est pas possible !

– Si je les revoie, je leur enfonce une flèche dans chaque tête ! Ils n'ont pas mis ton nom, mais je suis sûre que tout le lycée est déjà au courant. Ils ont porté plainte contre toi.

– Il n'y a eu aucun blessé, ils n'ont aucune preuve !

– Sauf que le père de la copine de Benjamin est flic, soupira-t-elle. Et tu portais une arme qui ne doit pas être très légale.

– J'avais oublié, concédai-je. Tu crois qu'ils peuvent me retrouver ?

Lucy songea à ma question, avant de secouer la tête.

– Tant que tu es à Light, tu es protégée, affirma-t-elle.

– Ouf ! dis-je, rassurée.

Lucy rangea son téléphone, pestant tout bas contre Benjamin. Ces idiots m'auront énervé jusqu'au bout. J'espérais sincèrement ne plus jamais les revoir.

La rentrée était le lendemain et bizarrement, je ne me sentais pas stressée. Après le dîner chez Lucy, nous sommes allées dans sa chambre, et j'ai commencé à feuilleter le livre en Bois d'Ambre du libraire. Lucy et moi avions pensé que le meurtre pourrait avoir un lien avec, et c'est pourquoi nous voulions trouver des informations dedans. Cette coïncidence était trop grande.

Lucy lisait par dessus mon épaule, cherchant à comprendre ce que ce livre pouvait avoir de spécial. Ses lunettes rouges tombaient presque de son nez, raison pour laquelle mon amie préférait les lentilles. Elle plissait des yeux et essayait de se concentrer, je le voyais bien. Mais au bout de deux minutes, elle éclata en râlant.

– Tous ces trucs ne veulent rien dire ! s'exclama-t-elle dans son lit, tandis que j'étais dos à lui, assise par terre. Comment tu fais ?

– Je t'avoue que je ne sais pas trop, m'esclaffai-je. J'ai l'impression de comprendre les tenants et aboutissants directement. Contrairement aux lettres classiques qui n'arrêtent pas de bouger !

Lucy hocha la tête, observa le mot mais râla une nouvelle fois. Cela m'amusait et me galvanisait mon ego, car pour une fois, j'étais meilleure qu'elle.

Je gloussais, récoltant une tape amicale sur mon épaule. La page que je déchiffrais parlait d'un Livre D se nommant Les armes de longue distance et courte distance à point précis. Le livre décrivait une arme ressemblant à une mini arbalète, qui permettrait de tirer selon une portée précise, en s'adaptant selon l'endroit de la cible. 

Je lisais avec un arrière goût amer, car l'arme me rappelait le meurtre du libraire. Je pensais l'avoir digéré, mais ce meurtre se révélait avoir beaucoup plus d'impact que je ne l'aurais cru. 

Je ne lus que quelques pages, car les recettes étaient tous plus compliquées les unes que les autres. Ce n'était pas pour une simple Lumière.

Lucy lisait un autre livre, Le seigneur des Anneaux, un classique chez elle. J'avais beaucoup apprécié les films, mais n'avais pas tenu deux pages en livre. Avec une dyslexie, c'était peine perdue. Demain s'annonçait être une journée rude, alors nous éteignîmes rapidement la lumière.

Au bout de peut-être vingt minutes, j'entendis des petits ronflements, provoquant un rire nerveux chez moi. Elle au moins, dormait tranquillement. Malgré tous ces événements, je restais assez calme et lucide face à ces évènements anormaux.

Je n'étais pas non plus complètement normale, vrai. J'aurais dû être contente, j'avais enfin découvert ce que ma mère me cachait, ce pourquoi mon père était parti et... non. En vérité, j'avais peur. 

Ce n'était pas le meurtre et la manticore, non; c'était une autre chose. Une peur plus profonde, plus intense. Tout simplement la peur, non la terreur, de l'inconnu. L'inconnu, cette chose que l'homme ne peux pas apprivoiser, même s'il essaye en permanence.

***

Que pensez-vous qu'il s'est passé entre Nathan et Mélissa ?

Mutante - Tome 1Where stories live. Discover now