Chapitre 24-3 : Indices

3.7K 401 29
                                    


Les larmes coulaient à flots sur mes joues. Je reniflai de façon disgracieuse, mes mains tremblaient et le besoin de crier m'alourdissait. Mais je me mordais les lèvres pour m'en empêcher. Ce serait le meilleur moyen d'attirer l'attention.

J'avais enfin eu un mot de mon père. J'étais de plus en plus proche de lui. Je murmurais « papa » pendant de longues minutes, les yeux fixés sur le mot. Il m'avait donné plusieurs pistes encore, et des réponses.

J'essuyais mes larmes d'un revers de la main et pris ma feuille avec les questions et les pistes. Le livre venait bien de mon père, qui l'avait donné au libraire. On aurait dit que mon père avait réparti des indices un peu partout, pour que je puisse le retrouver.

Mais pourquoi ? Ça n'aurait pas été plus simple de me laisser toutes les infos dans un mot et de me le transmettre ? Quoique, c'était un peu ce qu'il avait fait là. Je relus la phrase « Ne fais confiance à personne ». Peut-être lui non plus n'avait pas confiance en ces gens.

Bon, ensuite c'était bien ce que je pensais. Esteban Arrano avait des informations sur la mission de rang Z, bien plus qu'il ne voulait le faire croire. Je pourrais essayer de lui soutirer des informations plus tard. Mais ce sera difficile. Après, si la Roxanne dont il parle est Roxanne Sorn, c'est donc la confirmation que c'était lui qui lui avait appris à lire les Scriatés. Ça paraissait tout à fait logique. Bon, pour ça, ça ne changeait pas. Il allait falloir que j'aille lui parler.

Je continuai d'analyser la suite de la lettre. « Attends-toi à avoir beaucoup d'ennuis sur ton chemin ». C'était à cause de ces ennuis que mon père n'était pas rentré ? S'était-il fait capturer ? Ou tuer ? Si ça se trouvait, il était en train de se faire torturer pendant que j'étais enfermée ici.

Cette perspective provoqua un haut le cœur en moi. Je vis soudain l'académie comme une prison. J'aimerais tellement pouvoir communiquer avec l'extérieur, dire à ma mère ce que je venais de découvrir ! Cela me rappela Ella, qui communiquait grâce au professeur Belinski. Peut-être un autre professeur pourrait transmettre un mot à ma mère ?

C'était une évidence que le professeur en question serait Miller. C'était le seul en qui j'avais confiance. Enfin, la phrase « Ce que je cherche est ici ». Ici. Dans le livre ? Cette page ? Il avait nommé ce Livre D « Livre Z ». C'était sûrement pour me dire que ça avait un rapport avec la mission de rang Z, je ne voyais pas d'autre possibilité.

Je notai sur une feuille « Livre Z » avec une flèche et « mission ». Puis je continuai de lire la fiche. C'était vraiment super difficile et je dus mettre une bonne dizaine de minutes pour déchiffrer les quelques phrases d'introduction.

Je n'arrêtais pas de bailler. Je jetais un coup d'œil à ma montre. Trois heures trente-sept. OK, là il fallait vraiment que je me couche, demain j'avais cours. Mais j'étais tiraillée entre l'envie de continuer et de dormir.

Au final, je décidais d'arrêter. Je rangeai toutes mes notes dans le coffre, le fermai à clé et pris un de mes colliers. Il ne fallait vraiment pas que quelqu'un découvre tout ça. Je passai la clé du coffre dans une chaîne et me couchai. Je ne mis pas longtemps à m'endormir, rêvant de mon père et d'une certaine manticore.

Mon réveil sonna huit heures tapantes. Je grognai, voulant rester dans mon lit. J'avais cours dans une heure. Je me levai et m'étirai. Les événements d'hier soir, ou plutôt ce matin resurgirent d'un seul coup.

Je pris la clé à mon cou et ouvris le coffre. Tout était bien là, rangé – façon de parler – comme je l'avais laissé. Je jetais vite fait un coup d'œil à mon emploi du temps et vis que j'aurais besoin de mon livre d'études des Livres D.

J'aurais aimé pouvoir le laisser dans mon coffre, par peur de me le faire voler. Mais j'étais bien obligée de le prendre. Je mis tous mes livres et mon carnet de notes dans ma besace puis refermai le coffre.

Je mis mon uniforme et jetai un coup d'œil dehors. Il pleuvait. Super. Je mis donc une veste à capuche en dessous de l'uniforme. Je me regardai dans le miroir posé sur ma commode. Super, j'avais de belles cernes. J'entrepris donc de cacher tout ça, et me maquillai légèrement. Je ne vous dis pas la difficulté pour se maquiller avec un œil clair et un œil foncé.

Je souris devant la glace. J'avais vraiment meilleure mine. La magie du maquillage. Je m'attaquais ensuite à mes cheveux, que j'attachais en une queue de cheval bien serrée. Je pris la clé posée sur la commode, la mis autour de mon cou et la cachai sous mon t-shirt.

Je sentis le métal froid sur ma peau et me fixai droit dans la glace. Je montrai alors les crocs. Merde. Mes canines avaient franchement grandies. Pas au point de trop se faire remarquer de loin, mais elles avaient au moins cinq millimètres de plus. Si ce n'était plus.

Je n'avais pas intérêt à sourire près des yeux de quelqu'un. Mais elles ne me faisaient plus mal, ce qui devait être bon signe. Cela voulait sûrement dire qu'elles ne pousseraient pas plus. Je l'espérais. S'il vous plaît, faites que ce soit ça !

Je remis bien mon uniforme, puis ouvris la porte. Les filles descendaient tour à tour et j'entrepris de les suivre. J'essayai de repérer Lucy dans le Salon, mais ce fut elle qui me repéra la première. Elle bondit vers moi toute joyeuse mais fronça les sourcils en voyant mon visage.

– Salut ! Ella et les garçons sont déjà partis. Tu as mauvaise mine, déclara-t-elle de but en blanc.

– Ça se voit tant que ça ? désespérai-je.

– Non. C'est juste parce que je te connais et je vois à tes yeux que tu as pleuré. Que s'est-il passé ?

– J'ai fait une découverte, répondis-je, évasise. Je t'en parlerai plus tard.

Nous commençâmes à marcher vers la Cantine. Lucy ne me lâchait pas.

– Quelle découverte ? Dis-moi !

– Pas ici, murmurai-je. Ça concerne la mission de mon père.

Lucy allait répondre mais elle se ravisa. Elle hocha la tête et se tu.

Nous atterrîmes dans une Cantine bondée, logique vu l'heure à laquelle nous étions arrivées. Je me pris sur un plateau un bon petit déjeuner, j'avais vraiment faim.

– Tes dents vont mieux ? demanda Lucy en lorgnant sur mon petit déjeuner.

Pour toute réponse je lui fis un grand sourire. Elle parut effrayée un instant et je baissai les yeux.

– Oui. J'espère que le fait que je n'ai plus mal signifie qu'elles ne vont pas plus grandir. J'ai l'air d'un vampire, plaisantai-je à moitié.

– Sûrement, répondit Lucy d'un air convaincant.

Je passai ma langue sur mes nouvelles canines. Elles étaient bien tranchantes et lisses. Comme de nouvelles dents. En tout cas, elles avaient poussé vraiment très, très rapidement. Tant mieux, je n'avais pas eu mal très longtemps. Mais cela me faisait flipper.

Si un troisième bras me poussait, je ne pourrais pas le cacher. Et si des griffes commençaient à apparaître à la place des mes ongles, je ne pourrais pas non plus les dissimuler.

Mutante - Tome 1Where stories live. Discover now