Mutante - Tome 1

Chapitre 30-2 : Chasse au trésor

J'en restai interdite. J'y avais songé, mais très légèrement. Pourquoi mon père aurait fait ça ? C'était tellement plus simple de tout me dire directement ! Enfin, je savais pertinemment que cette pensée était innocente et naïve. Malgré tout, je ne pouvais m'empêcher de l'énoncer à haute voix, trop frustrée.

– Pourquoi ? m'insurgeai-je. C'est complètement stupide, il suffit qu'il me dise tout en une seule fois !

Lucy me lança un regard offusqué. Elle venait de se prendre une belle agression.

– Pardon, m'excusai-je, en me rendant compte de la colère que je lui avais adressé sans le vouloir. Tout ça m'exaspère tellement.

Le visage de Lucy devint compatissant, ce qui me confirma qu'elle m'avait pardonné. Je l'adorais cette fille.

– Je comprends. Je dirais que c'est pour te mettre à l'épreuve.

– A l'épreuve ? répétai-je, légèrement perplexe.

– Exact. A en croire cette lettre, et tous les efforts que font les Lumen Master pour cacher les informations, cette mission de rang Z m'a l'air, comment dire, importante. Dangereuse. Ou du moins, l'objet de cette mission a l'air démentiel. Mon hypothèse, je tente de l'expliquer. Ton père fait tout ça, commença-t-elle en ouvrant ses mains, pour que tu sois vraiment capable de réaliser cette mission. Que tu en aies les capacités. Déjà, le fait que tu aies eu le livre montre que tu voulais aller à Hélios. Sinon, tu ne l'aurais probablement jamais eu. Ensuite, ce que t'a donné Miller confirme le fait que tu es ici. Que tu as cherché à maîtriser Caligo. Sinon, si Miller n'avait pas été ton professeur, il aurait sûrement entendu parler de Caligo et aurait cherché à te rencontrer. Ce n'est pas tous les jours que l'on rencontre la fille de son maître. Je pense que Roxanne Sorn est un autre indice. Lopez t'a dit qu'elle habitait dans un endroit éloigné. A toi de trouver cet endroit. Tu comprends ? C'est comme-ci il avait planifié ton parcours. Et qu'il suffisait de le suivre.

J'en restai bouche bée et complètement abasourdie. Maintenant que Lucy faisait le lien, je me rendis compte de tous ces indices que j'avais eu, non pas par hasard mais parce que mon père les avaient placés là. Je suivais les traces qu'il avait laissé. 

Quelque part, j'étais heureuse, de l'autre, j'avais l'impression d'être une marionnette que l'on contrôlait comme une poupée sans âme.

– Ce serait tellement bien de pouvoir chercher maintenant ! s'exaspéra Lucy.

– Crois-moi, j'aimerais vraiment pouvoir, dis-je en serrant les dents, laissant mes pensées noires de côté. Je ne pense pas que l'on puisse faire grand-chose pour l'instant. D'ailleurs, à propos de Gale, tu as trouvé des indices ?

Un éclair de fureur que je ne compris pas parcourut les yeux de Lucy un bref instant. Mais il ne m'était pas adressé, elle avait regardé derrière mon épaule. 

Quand Lucy pensait à quelque chose ne se trouvant pas dans la pièce, elle avait tendance à fixer un point derrière. Je me demandais ce quel était le mot qui l'avait mise en rogne. Elle ne m'en parla pas, je ne lui demandai donc pas.

– Je crois. Tu veux voir ? me proposa-t-elle en m'affichant un sourire las.

J'acquiesçai, et elle me conduisit dans sa chambre. Tout me paraissait normal quand j'entrai, sauf un détail : le rideau épais, qui habituellement cachait la lumière de la fenêtre, avait été déplacé. Il était maintenant sur le mur de gauche, derrière la commode. Lucy poussa d'ailleurs celle-ci et fit doucement glisser le tissu. 

Ce que je découvris me déconcerta. Moi qui me contentais de mes schémas sur mes carnets, Lucy avait vu les choses en grand. La recherche de Gale était un fouillis de fils rouges, blancs et noirs. Chacun reliait un objet à d'autres, parfois coupés de notes que je ne pouvais évidemment pas lire.