Chapitre 36-4 : Recette

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Il faisait déjà nuit quand je me réveillai. Une douleur lancinante perça mon crâne. Elle fut suivie par mon dos de près. Ces deux là se faisaient de la concurrence. Bon sang, j'avais trop abusé du fluide. Je n'eus même pas le courage de me lever. 

J'attendis encore, cherchant mon souffle. Il était encore heurté, comme si je venais de sortir de la bibliothèque. Je jetai un coup d'œil à mon téléphone et vis qu'il était vingt heures. Vingt heures ! Non, il y avait un problème. Je n'avais pas utilisé le fluide plus d'une heure. La fatigue m'avait-elle rattrapé à ce point ? Ou parce que j'avais forcé le fluide, cela m'avait bien plus coûté ? D'ailleurs, mes maux persistaient. Mon ventre aussi criait famine. En soupirant longuement, et en me redressant tout doucement, je décidai d'aller manger. J'irai mieux après, je m'en persuadai.

Une frayeur me parcourut soudainement. Et si on m'avait repéré ? Ce que j'avais fait équivalait à un renvoi, voire plus. J'avais été un peu inconsciente de faire ça, je m'en rendais compte maintenant. Un sentiment d'angoisse m'envahit, sans que je ne puisse l'ignorer. La boule au ventre – et pas parce que je crevais la dalle – je me dirigeais vers la Cantine. Elle était pleine à craquer, comme chaque soir. 

Je me fis toute petite, et pris un plateau repas. Je dénichai un reste de paella, puis allai m'asseoir à une table. Je mangeai rapidement, voulant le plus vite possible retourner dans ma chambre. J'avais l'impression d'être observée, comme si on cherchait la moindre petite chose pour me nuire. Je devenais parano. Cette excursion dans la réserve m'avait volé toutes mes forces. 

Je débarrassai mon assiette et rentrai dans ma Sphère. En arrivant dans le Salon, Lucy me tomba dessus, le visage fatigué.

– Où étais-tu ? me sermonna-t-elle comme ma mère.

– J'ai fait quelques recherches, répondis-je évasement. Pardon de t'avoir inquiété, mais je peux me débrouiller, ne t'en fais pas.

Je la voyais peiner à garder ses yeux ouverts, elle penchait quasiment sur le côté. C'était limite si je ne devais pas la rattraper avant qu'elle ne tombe.

– Je sais, marmonna-t-elle en baillant. Mais avec ce qu'il se passe, j'ai peur pour toi. Imagine si tu utilises le fluide et que quelque chose de grave se passe !

– Tout va bien, la rassurai-je, alors qu'un léger trémolo persistait dans ma voix. Mais j'ai trouvé quelque chose d'intéressant.

Le visage de Lucy s'illumina d'intérêt. Incorrigible, celle-là ! Toute fatigue disparue, elle me fit signe d'aller nous asseoir avec Zéphyr, pour que je lui raconte tout. Je résistais, ma chambre m'appelait depuis un moment. Mais son insistance me convainquit, et puis il fallait bien que je leur explique à un moment. 

Je m'assis dans un petit coin du Salon. Zéphyr nous regarda avec méfiance en voyant l'air comploteur de Lucy. Avec les deux recettes que j'avais, il y avait de quoi accéder au sous-sol, puisque Lucy et Zéphyr en avaient fini le décodage.

– Alors ? me demanda ce dernier.

Je leur exposai ce qu'il s'était passé, en passant sous silence ce que Rilvan m'avait demandé, ainsi que son aide. Il ne voulait pas que ça se sache, je respecterai son choix. Le nombre de choses que je devais garder secret, c'était à vous rendre fou ! Et quelque part, cela me rongeait. J'étais soudainement impatiente de finir tout ça, de retrouver mon père, et une vie normale par la même occasion.

Les douleurs dans mon dos me ramenèrent à la réalité. Jamais je n'aurais de nouveau une vie normale. En avais-je déjà eu une ? Quoi qu'il en était, les sensations des "os" de mon dos me tiraient. Ils devaient encore avoir grandis. Rien que d'y penser, des images effrayantes apparurent devant mes yeux.

Mes amis durent m'appeler à plusieurs reprises pour me sortir de ma torpeur. La fatigue m'accablait, et n'augurait rien de bon chez moi.

Retrouvant mes esprits, je leur expliquai les deux recettes. L'une consistait à bloquer les caméras sur une seule image, l'autre à provoquer un bug et déclencher leur réinitialisation. Nous nous mîmes d'accord sur le fait que la première donnerait le moins de soupçons, et qu'elle était la plus simple. Même très, très simple. Mais en Scriatés. 

Les recettes les plus simples, mais les plus efficaces, étaient souvent dans cette langue. Pour en préserver les gens ? Mais de qui ? Et si une autre personne comme moi, mise à part mon père, se mettait à tout traduire ? Je secouais ma tête, de nouveau en proie à mes questionnements habituels. Éreintée, mon lit m'appelait.

Je repris le cours de la conversation. Lucy prenait des notes sur cette fameuse recette. Pour les ingrédients, nous demanderions de l'aide à Miller.

– Je le revois demain soir, annonçai-je. Nous verrons ce qu'il en pense.

– Ça marche, accorda Lucy. Par contre, comment tu es entrée et tout ça... C'était super dangereux !

– Je sais, soupirai-je en me frottant le visage. Mais nous n'avons pas vraiment une palette de choix très large. Ce qui m'intrigue le plus, c'est le lien que j'ai avec ce Mutant.

Lucy avait eu le visage figé au moment où je lui avais expliqué que l'ababil m'avait aidé tout au long de mon... « vol ». Oui, ça en avait tout l'air, même si « emprunt » correspondait mieux pour moi. Et Rilvan aussi, il était mon complice. La recette qu'il m'avait demandé m'intriguait toujours. 

Mais je ne me faisais pas trop de soucis concernant l'utilisation de celle-ci, il ne pourrait jamais l'utiliser normalement. Elle était écrite en Scriatés. Et même s'il tentait de la traduire, cela lui prendrait des années. Les Scriatés du livre étaient vraiment compliqués. 

Nous émettions des hypothèses sur l'ababil, comme quoi cela devait avoir un lien avec ma mutation, peut-être me transformais-je en Mutant de type vol, etc.

Même si cela me faisait froid dans le dos, j'avais un peu moins de mal à en parler. Je n'étais plus autant dans le déni, malgré l'angoisse que cela faisait naître en moi. Il me fallait l'accepter, et c'était comme cela que je pourrais avancer. Au niveau du fluide, Zéphyr déduisit que c'était peut-être parce que je l'avais beaucoup utilisé en terme de concentration. Il fallait peut-être que mon corps récupère plus. C'était l'hypothèse la plus probable. 

Comme moi, mes amis avaient peur des répercussions que cela pourrait avoir si quelqu'un découvrait ce que j'avais fait. Mais bon, j'imaginais qu'on le saurait déjà. Après avoir longuement discuté, nous décidâmes d'aller nous coucher. Une longue journée d'examens nous attendait demain. Je montai les marches, exténuée par les événements s'étant déroulés aujourd'hui. 

Comme chaque jour, c'était mouvementé. J'avais l'impression que ma vie n'avait jamais été aussi remplie que ces derniers mois. Je m'écroulai dans mon lit, et m'endormis juste après avoir fermé les yeux.

***

Chapitre 36 terminé ! La découverte du sous-sol approche à grands pas, et ce qui pousse dans le dos d'Amy grandit aussi ^^ 

Il ne reste que quelques chapitres avant la fin du tome 1, et les réponses pour la FAQ arrivent bientôt !

Bonne semaine à tout le monde !

Mutante - Tome 1Where stories live. Discover now