Chapitre 40-2 : Final

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– Arrête de délirer ! s'écria Abel.

– Non, faites-moi confiance. Je vais attirer son attention, et vous grimpez sur son dos. Attachez vous avec des lianes, et rattachez-en une à l'arbre le plus proche. Comme ça, vous êtes sûrs de ne pas tomber.

– Pas bête, réfléchit Nami. J'ai aussi une autre idée ! Suivez-moi, je pense que cela peut marcher ! Amy, tu captes l'attention du Mutant à partir de où ?

– Juste devant lui. Je vais essayer d'attirer ses trois têtes.

Ma tentative paraissait folle. Elle avait peu de chance de réussir, mais c'est tout ce qui nous restait.

– Tu es vraiment suicidaire, dit Abel en secouant la tête.

Convaincue qu'il allait m'empêcher de réaliser mon idée, je me préparais à répliquer. Mais Abel me coupa directement.

– Mais c'est notre seule solution, alors allons-y !

– Amy... m'appela Brit, tu es sûre ? On peut renoncer, tu sais.

– Non, contredis-je. On doit au moins tenter une dernière chose.

Brit n'objecta pas. Les quatre se mirent en route, et passèrent discrètement derrière le Mutant. Tant que l'on ne faisait pas de bruit, ça allait. Mais monter sur son dos, avec leur hyper sensorialité la discrétion c'était impossible. J'attendis que le quatuor soit bien attaché, ce qui fut le cas quelques minutes après. Ils étaient extrêmement rapides. Nami m'indiqua que c'était bon. A moi de jouer. Je sortis des branchages. Je me postai alors devant la créature, et me concentrai du mieux que je pus.

– Eh, ducon ! l'appelai-je.

Bon, c'est vrai, il y avait plus fin comme distraction. Mais cela me permit de sortir un peu de haine. Les trois têtes se tournèrent vers moi, et le Mutant hurla soudainement de ses trois trompes. Je fis signe aux autres qu'ils pouvaient y aller. Mon cœur accéléra sa cadence, et la peur m'envahissait progressivement. Mon côté rationnel me hurlait que j'étais en train de faire une belle connerie.

Alors que le Mutant me fixait de ses yeux écarlates, je fermai les miens et le rouvris. Rien ne se passa. Allez, s'il te plaît ! Utilisant toute la force que je possédais, je réessayais. Un frisson me parcourut quand l'une des têtes du Mutant s'avança. Je me concentrais encore, les mains tremblantes. 

Alors une vague de chaleur s'empara de mon corps. J'avais réussi ! J'avais réussi ! J'avais activé le fluide ! Je fus galvanisée par ma réussite, et j'en aurais presque oublié ce que je devais faire.

Comme je m'en doutais, l'attention du Mutant à mon égard fut redoublée quand il se rendit compte que j'avais activé le fluide. Je sortis alors Caligo, même si cela ne me servirait peut-être pas. Tout ce que j'avais à faire, c'était concentrer son attention sur moi. 

La trompe du milieu tenta de me balayer, mais grâce au fluide je pus aisément l'éviter. Il tenta de me balayer encore deux ou trois fois, jusqu'à qu'il comprenne que cela ne servait à rien. Puis il commença à bouger une patte avant. Allez, continue ! Mais son corps se mouva vers la droite, vers mes amis.

– Non ! criai-je.

Je fonçai alors vers lui, ignorant royalement toutes les conséquences que cela allait avoir sur mon corps. Avec le fluide, j'arrivais à ignorer toutes ces douleurs, alors j'en profitai. Je m'approchai assez de lui pour le blesser à une patte avant. Peu profondément, mais assez pour qu'il se concentre sur ses pieds et arrête de bouger. De plus, mon épée le brûlait dès qu'un contact était fait. Je passai alors à l'autre patte, la blessant aussi.

Je reculai, le Mutant chercha toujours à me balayer avec ses trompes. Il n'avait pas d'autres attaques, puisqu'elles nécessitaient quasiment toues qu'il se mette sur ses pattes arrières. Chose qui lui était impossible de faire pour l'instant. Je continuai ce petit jeu encore plusieurs balayages, jusqu'à que la voix d'Abel retentisse.

– C'est bon ! On l'a mis ! cria-t-il de victoire.

Un immense soulagement s'empara de moi. Nous avions réussi. Enfin. Puis une douleur au dos me ramena soudainement à la réalité. C'était devenu le signe annonciateur que le fluide allait disparaître. Je courus alors de toutes mes forces dans les branchages, consciente que chaque seconde comptait. Une fois un peu à l'abri, je m'écroulai sur le sol mouillé.

– Elle va bien ? demanda une voix.

– Oui, sa vie n'est pas en danger, répondit quelqu'un d'autre. Mais on dirait que son corps s'est automatiquement mis en repos pour se soigner.

– Combien de temps ça va durer ? demanda l'autre voix, nerveuse.

– Encore quelques heures je pense, avec les élixirs qu'on lui a administrés, elle va vite se réveiller.

Mais ses cauchemars n'arrangent pas les choses. Repasse la voir demain matin.

– Merci, dit l'autre voix en s'éloignant.

Je ne pouvais pas ouvrir les yeux. Mon corps était immobile, et refusai catégoriquement de m'obéir. Je tentai de trouver ou je me situais. Je n'étais pas dans ma chambre, j'aurais reconnu le lit. Non, celui-ci était beaucoup plus dur et les draps sentaient la lessive. Il me fallut un bout de temps pour reconnaître l'infirmerie, signe que je n'étais pas au meilleur de ma forme. Je me souvins progressivement des événements passés. Nous avions réussi l'examen.

Un soulagement immense m'envahit, c'était déjà une étape de passée. Mais j'avais activé le fluide. Je ne pensais pas que les profs l'avaient vus, j'avais pris soin de détacher mes longs cheveux. Mais cela dut leur paraître étrange que je saute dans les fourrés pour me cacher et que je m'évanouisse dans la seconde qui suit. 

Quoique, dit comme ça, cela paraissait probable. J'étais juste prévoyante. Heureusement que je ne me suis pas évanouie juste devant l'airavata, sinon crêpe d'Amy garantie ! Frôler la mort activait mon sarcasme, manifestement.

Pendant un moment interminable, je tentai de bouger mes membres, ne serait-ce qu'ouvrir les yeux. Mais non, mon corps boudait. Cela n'avait pas du lui plaire que j'active le fluide avec une, voire plusieurs côtes cassées. Dès que l'on ne ressentait plus la douleur, on se sentait beaucoup plus libre. Puisque mes yeux me faisaient la tête, je me concentrai sur les bruits environnants. Je pouvais entendre Mme. Neil, l'infirmière, parler à plusieurs personnes, et les gémissements de douleurs m'indiquaient que je n'étais pas la seule à être cassée en plusieurs morceaux.

Ma réflexion que j'aurais été une crêpe me donna faim, et me mis l'eau à la bouche. Mon ventre criait famine. Comme quoi, il était toujours en marche lui. Cela me fit me demander depuis combien d'heures j'étais alitée. Pendant un nouveau laps de temps indéfini, je tentai par tous les moyens de bouger mes membres. 

Ah, j'avais une réponse ! Ma paupière venait de faire une crise d'épilepsie. J'entendais déjà la voix de ma mère « tu manques de magnésium ». Je manquais d'autres choses aussi actuellement. Ma mère. Serait-elle fière de ce que j'étais devenue ? Ou aurait-elle peur de moi ? Me poser ce genre de questions en cet instant, c'était tout moi. Ma conscience vacillait, alors je me focalisais sur autre chose que mes sombres pensées.

Bon, concentration maximale, mission : bouger un orteil. Au bout d'un long moment, je dirais une demi-heure à tout casser, à insulter toutes les parties de mon corps, mon œil droit dédaignât s'ouvrir. Le gauche suivit quelques secondes plus tard. Je pus enfin voir un peu de ce qui m'entourait. Enfin, « voir » est un grand mot. La vive lumière de la pièce m'aveugla un moment. Il me fallut un temps d'adaptation.

Je pus enfin avoir une vision globale de ce qui m'entourait. Et aussi que j'avais changé de vêtements. Je sentis mon visage chauffer à cette pensée, mais me ressaisis vite. J'avais encore mon bandage autour du buste. Donc personne ne devait avoir vu mes cicatrices. J'espérais. 

Mon lit était séparé des autres par deux rideaux en plastique, de sorte que je ne voyais que celui qui était à côté de moi. Au bout d'un long moment, je pu enfin me redresser tout doucement. Mais ce mouvement me fit tourner la tête, et ma vue se brouilla. Mon environnement tournoyant autour de moi, je me rendormis.

Mutante - Tome 1Where stories live. Discover now