Chapitre 37-3 : Cacher

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Je me trouvais dans le gymnase, attendant mon prochain match. Aujourd'hui, combat à mains nues. Caligo, c'était pour plus tard. J'allais affronter Badr. Il était plus massif que moi, mais un peu plus petit aussi. D'accord, seulement de trois ou quatre centimètres, mais cela pouvait jouer ! Ce fut à mon tour de monter sur le ring. 

Badr fit de même, et nous nous défiâmes du regard pendant un moment. Je secouais mes mains, prête à en découdre. Badr avait un regard aussi déterminé que le mien. L'arbitre donna le coup d'envoi. Soufflant un long coup, un sourire commença à apparaître sur mon visage. C'était parti pour la bataille !


– Aïe ! m'écriai-je quand l'infirmière, Mme. Neil, tapota mon nez avec son coton.

– Ne te plains pas, tu n'as pas voulu d'élixir !

Je n'en voulais pas, tout simplement parce que c'était horriblement dégueulasse ! D'accord, cela enlevait la douleur, mais à quel prix ! L'infirmière ayant fini d'appliquer de l'alcool, elle me mit un pansement sur le nez. J'avais l'air bien avec ce truc !

– Tu pourras l'enlever ce soir, m'indiqua-t-il. Il est recouvert d'un élixir réparateur.

Je remerciai l'infirmière, qui partit s'occuper d'un autre patient. Je m'écroulai sur le lit de l'infirmerie, exténuée. Le combat contre Badr m'avait déjà épuisé, il se mouvait à une vitesse difficilement esquivable. Du coup, j'avais perdu. Puis je m'étais pris un coup dans le genou, ce qui m'avait fragilisé.

 Par la suite, j'avais affronté Zohra, qui elle m'avait défoncé le nez. J'avais failli gagner, mais elle m'avait fait tomber en tapant au même endroit que Badr. Maline, elle avait observé mon combat précédent. En bref, j'avais perdu mes deux combats, et repartais avec des douleurs au nez, au genou et au ventre. Quand dame nature décide de te pourrir la vie pile au moment ou il ne faut pas ! 

J'avais terminé les examens pour la journée d'aujourd'hui, et avais rendez-vous avec Miller dans vingt minutes. Je profitai de ce laps de temps bienvenu pour récupérer un tant soit peu. Tant que la folie des épreuves ne continuaient pas tout de suite.


Je marchai dans la forêt, presque arrivée à notre point de rendez-vous habituel. Mon professeur particulier devait me rejoindre dans quelques minutes. Je portai ma besace et Caligo sur mon épaule, évitant les branches et autres racines sur mon passage. Elles me rappelèrent ma course effrénée, quand j'avais activé le fluide par mégarde. Des souvenirs pas très jolis. Enfin j'arrivais à mon tronc d'arbre mort favori. Miller me rejoignit un peu plus tard, l'air fatigué.

– Bonjour ! le saluai-je.

– Salut Amy, me répondit-il en baillant.

Il s'assit brusquement sur le tronc et poussa un râle de soulagement. Cela me fit sourire, presque rire. Il avait les cheveux en bataille, et venait visiblement de courir.

– Qu'est-ce que je peux détester les examens ! se plaignit-il.

On aurait dit une phrase d'un élève, et non d'un professeur ! Je riais franchement cette fois-ci.

– Crois-moi, c'est autant la misère pour les profs que les élèves ! me morigéna-t-il en me pointant du doigt. La préparation, c'est vraiment pas mon truc !

Je m'esclaffai une nouvelle fois. Miller me demanda rapidement comment s'était déroulé mes épreuves, et nous en vînmes à un sujet plus sérieux. Les caméras. Malgré quelques hésitations, je lui racontai mon excursion dans la seconde réserve.

– Tu... tu as quoi ?! s'écria Miller, complètement effaré. Tu es entrée dans la réserve. Tu es entrée dans la réserve. Mais tu es complètement inconsciente !

– C'est moins pire qu'entrer dans le sous-sol, protestai-je.

C'est vrai, quoi ! Entrer dans le sous-sol était beaucoup plus dangereux ! Mais les paroles de Miller me faisaient regretter un peu plus mon acte. Bien que dans le règlement, rien ne l'interdise. En même temps, nous n'étions pas sensés connaître l'existence de ce sous-sol. Et pourtant, il était là depuis des siècles, sous nos pieds.

– Tu... tu es sûre et certaine que personne ne t'as vu ? demanda-t-il, une fois remis.

Je haussai les épaules en levant les mains paumes vers le ciel. Je jouais la nonchalante, alors qu'en vérité je m'attendais toujours à être convoquée et renvoyée.

– Je ne serais pas là sinon.

Miller tapait nerveusement la cadence de sa jambe.

– Oui, c'est vrai, concéda-t-il. Qui d'autre le sait ?

– Lucy, Zéphyr et...

Mince, devais-je dire que Rilvan était aussi au courant ? Après tout, sans lui je n'aurais jamais réussi à y pénétrer avec autant de discrétion. Miller le comprendrait assez vite, jamais je n'aurais pu y arriver seule. Rilvan ne m'avait pas explicitement interdit de parler de lui. Mais en sous-entendu, oui. Après, il devait se douter aussi que je n'allais pas crier sur tous les toits que j'étais entrée dans la réserve.

– Qui ? insista Miller, me fixant avec insistance dans les yeux.

– Je ne peux pas le dire. Je ne veux pas lui attirer de problèmes, il en a déjà fait beaucoup pour moi.

Même si c'était surtout pour lui et ce Livre D qu'il l'avait fait. Mais il m'avait quand même aidé, et ce n'était en aucun cas une excuse pour le dénoncer. Même à Miller.

– Amy ! s'exclama Miller. Tu sais que je n'irais jamais le dire ! Tu peux me faire confiance. Attends...

Miller sembla réfléchir un instant, puis me sortit son nom. Et merde.

– Rilvan ? C'est le seul susceptible de connaître la réserve et de t'aider. Sauf si c'était madame Riss, ce qui n'étonnerait franchement.

Miller n'eut pas besoin de réponse vocale, seul mon visage suffisait à me trahir. Ça, c'était quelque chose que je n'arrivais jamais à faire. C'est-à-dire cacher ce que je ressentais. C'était pour ça que mentir était quelque chose de très risqué avec moi. Ça se voyait directement sur mon visage, si l'on savait un tant soit peu le lire. Même si je tentais de le travailler, surtout à cause des Lumen Master qui me posaient des questions... assez dangereuses. 

Ce qui m'étonna, c'est que Miller avait directement écarté Mme Riss. Pourtant, j'en gardais la forte impression qu'elle m'avait aidé. Mais cela pouvait signifier qu'elle n'avait pas de lien direct avec mon père, sinon mon professeur le saurait. Il soupira longuement, se grattant l'arrière de sa tête.

– Contre quoi ? Il a beau être très gentil, je doute qu'il ait fait ça gratuitement.

– J'ai déjà rempli cette part de notre marché, éludai-je. Pas de risque de ce côté là.

Mutante - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant