Mutante - Tome 1

Chapitre 39-1 : Abel

Le Mutant bondit sur ses pattes arrières, et tout en s'écrasant lourdement sur le sol. Ses immenses trompes s'élargirent, pour nous faucher dans un souffle. Cette combinaison nous projeta tous les cinq contre le mur du fond, et Nami dut lâcher la boite au passage. Non ! Si l'airavata l'écrasait, nous échouerions !

Je compris que le fait d'avoir la boite nous obligeaient à faire attention à ce paquet, tout en devant l'amener quelque part. Le tout sans se faire tuer. De plus, le coffre avait beau ne pas être grand, il était d'une lourdeur incommensurable. Comme s'il était rempli de plomb, cela n'arrangeait rien. Mes camardes mirent un temps à réagir, encore surpris par l'arrivée de ce Mutant, aussi démentielle était-elle. Mon premier réflexe fut de plonger à nouveau sur le coffre, et de grimper dans les arbres. Cette boite était un sacré poids, au sens littéral comme au figuré.

J'en choisis un tronc rêche, qui me permis de monter bien plus facilement. Abel fut le premier à me remarquer, et sauta rapidement à côté de moi. Brit, Nami et Achille choisirent de faire de même, mais à l'opposé du chemin. Nous ayant attaqué de front, l'airavata avait usé un peu de son énergie. Il ne nous avait pas vu, nous permettant de nous planquer. Brit me lança un regard de loin, et je hochai la tête. 

Je lui fis comprendre qu'il nous fallait rester caché, le temps de savoir quoi faire. Après tout, nous n'avions pas de limite de temps. Je me dissimulais derrière une autre branche, et sentis Abel se rapprocher de moi. Je ne pouvais pas le voir à travers les branches épaisses, mais pouvais deviner son expression.

– Tu n'as pas paru surprise en voyant ce Mutant, me chuchota-t-il d'une voix évidemment soupçonneuse.

– Toi non plus, rétorquai-je froidement.

Je sentis dans son rire qu'il était en train de sourire.

– Alors je ne suis pas le seul à avoir des sources. Tu savais de quel type de Mutant il s'agissait ?

Je réfléchis minutieusement à ma réponse. Il ne fallait pas que j'admette sans faire exprès que j'étais au courant.

– Je soupçonnais fortement qu'il y allait en avoir un. Surtout que mettre une boite dans un trou, c'est beaucoup trop facile.

Encore une fois, il parut sourire. Tout cela l'amusait.

– Eh bien eh bien, soupira-t-il en se rapprochant de moi. Une idée ?

– A toi de me le dire, répliquai-je en me tournant vers lui. Comment penses-tu faire ?

– Honneur aux dames, chérie, rétorqua-t-il dans un fou rire.

Je levai les yeux au ciel. Il m'agaçait profondément. Sous son air de mépris, il avait un sacré caractère d'emmerdeur. Je le savais maintenant.

– Tu peux cesser de faire l'idiot deux minutes ? On passe un examen je te signale, m'exaspérai-je en le fusillant du regard.

– C'est bon, calme-toi. Faut que tu apprennes à te décoincer, sérieux.

Je ne relevai pas, décidant de laisser tomber. Qu'il fasse l'idiot s'il voulait. En tout cas, il était aussi au courant qu'il allait y avoir un Mutant.

– Par qui tu l'as su ? demandai-je tout de même.

– Ça ne marche pas comme ça, Weyl, fit-il en balançant son index de droite à gauche. Tu me dis qui et je te répondrai.

– Je t'ai dit que ce n'était qu'une supposition ! m'écriai-je.

Abel eut un sourire en coin et me lança un regard d'évidence du style « c'est marqué idiot sur mon front ? ». Je décidai de vraiment laisser tomber.

– Bon, puisque c'est quand même un examen, je vais quand même faire un effort, soupira-t-il d'un air d'ennui. Brit a raison en disant que l'on peut utiliser les lianes, c'est, je pense, le seul moyen. Le tout, c'est de distraire l'airavata assez longtemps. J'imagine que tu as vu qu'il avait trois têtes, et que donc échapper à sa vigilance est assez difficile. Le truc, c'est que ce Mutant aime les attaques qui englobent toute la surface de ses ennemis. Concentrer sa force en un point, il ne connaît pas. Et ses attaques sont très lourdes, il a du mal à s'en remettre.

– Donc ton idée c'est d'agir juste après une attaque ? poursuivis-je sur sa lancée.

– Exactement. Il faut que chaque personne s'occupe d'une tête, pour qu'il ne se rende pas compte que deux autres se faufilent derrière.

– Ça ne devrait pas être trop compliqué, marmonnai-je, un poil rassuré.

Abel s'esclaffa derechef. Je lui lançai un regard interrogateur. J'en avais marre qu'il se moque de moi à chaque occasion.

– Regarde un peu ou est le Mutant.

Je le fis, et vis qu'il restait planté devant la grille, à un ou deux mètres. Il nous savait pas loin dans les arbres, mais n'avait pas avancé pour nous tuer.

– Les airavatas protègent leur territoire plus que tout, mais surtout leur « nid ». Là où se trouvent en général leur réserve de nourriture, récita Abel.

Je compris où il souhaitait en venir. On n'arriverait pas à l'attirer plus loin, il resterait en dessous du trou.

– C'est pour ça que le trou est là, déduisis-je. Juste en dessous du nid du Mutant, pour être sûr qu'il le protège en même temps.

– Bravo Sherlock ! s'exclama Abel tout en applaudissant.

Je fus encore plus exacerbée, tant que ce soit possible.

– Comment tu veux réaliser ton plan alors ? demandai-je, perplexe.

– Il faut trouver un moyen de l'attirer, répondit Abel en haussant les épaules, geste qui me tapait sur les nerfs.

– Tu te moques de moi ? m'exclamai-je sans le vouloir. Comment tu veux que l'on attire un truc pareil ? Il doit faire au moins cinq tonnes au bas mot !

– C'est ce qui rend la chose amusante, gloussa Abel.

Je ne pu m'empêcher de lui donner un petit coup sur l'épaule, tant j'étais exaspérée par son indifférence. Il en ria de plus belle, ce qui me fit grogner. J'allais l'étrangler. Mais mes réactions étaient surtout amplifiées par le stress. Comment aurais-je pu deviner que cela allait être un Mutant de cette taille ?

– Quand même, ne pus-je m'empêcher de remarquer, ce Mutant pourrait facilement nous tuer.

Les professeurs prenaient un sacré risque quand même.

– Mouais, fit Abel en faisant mine de réfléchir. Suffit de savoir comment s'y prendre.

Je fronçais les sourcils, ne sachant pas où il voulait en venir.

– Tu veux le tuer ? m'exclamai-je.